Si la connaissance crée parfois des problèmes, ce n'est pas l'ignorance qui permet de les résoudre
La Démocratie à la Croisée des Chemins : Bilan Mondial puis Focus sur les U.S.A et la France
À l’heure où nous entamons le deuxième trimestre 2025, le concept même de démocratie semble plus fragile et contesté que jamais. Les derniers rapports internationaux dressent un tableau préoccupant : pour la première fois en plus de vingt ans, le monde compte davantage d’autocraties (91) que de démocraties (88), selon les données de l’institut V-Dem. Cette tendance s’inscrit dans ce que les experts qualifient de « troisième vague d’autocratisation » , un phénomène qui touche désormais près de trois quarts de la population mondiale.

Examinons les dynamiques globales qui façonnent ce recul démocratique, avant de nous pencher plus spécifiquement sur les cas américain et français.
L’article étant très long, je l’ai divisé en 3 sections sur lesquelles il faut cliquer pour les dérouler
Le concept de démocratie, bien qu’universellement valorisé, prend des formes variées et fait l’objet d’évaluations à l’échelle mondiale. Le dernier bilan de l’institut V-Dem révèle une situation préoccupante pour l’avenir des régimes démocratiques, avec une tendance inquiétante à l’autocratisation et une situation particulièrement alarmante aux États-Unis, alors même que cette analyse ne prend pas en compte les derniers évènements depuis l’investiture de Donald Trump ! On reviendra sur quelques uns des derniers faits marquants de l’actualité des U.S.A ayant eu lieu depuis mon dernier article il y a quelques semaines.
Les différentes catégories de démocraties
Les systèmes démocratiques peuvent être classifiés selon plusieurs typologies qui reflètent leurs mécanismes de fonctionnement et leur qualité:
- La démocratie directe : système où les citoyens exercent directement le pouvoir, sans intermédiaires. Ils préparent, proposent et votent eux-mêmes les lois. L’Athènes antique en constitue l’exemple historique fondateur, avec son Ecclésia où les citoyens votaient à main levée.
- La démocratie représentative ou indirecte : forme la plus répandue aujourd’hui, où les citoyens élisent des représentants chargés d’établir les lois. Apparue avec les révolutions américaine et française, elle s’est imposée notamment à cause de contraintes liées à la taille des populations et l’étendue des territoires.
- La démocratie semi-directe : système hybride où les citoyens élisent des représentants mais peuvent aussi participer directement aux décisions via des référendums. La Suisse en est l’exemple le plus abouti, avec quatre consultations populaires annuelles.
- La démocratie participative : les citoyens sont associés aux décisions prises par les représentants en dehors des échéances électorales traditionnelles.
Ces démocraties peuvent également s’organiser selon différents régimes institutionnels :
- Le régime parlementaire (gouvernement responsable devant le Parlement)
- Le régime présidentiel (séparation stricte des pouvoirs, comme aux États-Unis)
- Le régime semi-présidentiel (comme en France)
- Le régime d’assemblée (une assemblée unique détient tous les pouvoirs)
Pour évaluer la qualité démocratique, des organismes comme V-Dem classent les pays en quatre catégories :
- Démocraties libérales : niveau le plus élevé de démocratie
- Démocraties électorales : respectant les principes électoraux de base
- Autocraties électorales : apparence d’élections mais déficit démocratique important
- Autocraties fermées : absence des principes démocratiques fondamentaux
A Savoir: Même si V-Dem est considéré comme l’étude de démocratie la plus fiable, aucune n’est parfaite. Les indices de démocratie comme Freedom House, EIU et V-Dem présentent pour certains des limites : ils négligent souvent la protection sociale, l’égalité économique et la transparence des données, reflètent une vision occidentale (particulièrement américaine) de la démocratie, et impliquent inévitablement des choix subjectifs dans leur méthodologie de mesure.
L’évolution préoccupante des démocraties dans le temps
Les données dressent un tableau alarmant de l’état actuel de la démocratie mondiale. Après une progression observée entre 1989 et 2012, la démocratie connaît désormais un déclin significatif.
Selon le rapport V-Dem 2025, la situation s’est particulièrement dégradée au cours des deux dernières décennies :
- En 2004, 49% de la population mondiale vivait sous un régime autoritaire ; ce chiffre est passé à 72% en 2024.
- La proportion de la population mondiale confrontée à un processus d’autocratisation est passée de 7% en 2004 à un 38% en 2024.
- Le rapport 2017 de l’indice de démocratie montrait déjà cette tendance avec 89 pays en régression démocratique contre seulement 41 en progression.
- Seulement 6% de la population mondiale vit dans un pays en voie de démocratisation en 2024 contre 13% en 2004.
- Il ne reste plus que 28% de la population mondiale qui vit dans une démocratie en 2024 alors que cette part était de 51% en 2004.


- Meilleures démocraties : Les pays scandinaves dominent depuis des années. En 2024, la Norvège reste en tête avec un score de 9.81, suivie par l’Islande, la Suède et la Finlande. Ces pays se distinguent par leurs institutions robustes et un haut niveau de participation citoyenne.
- Pires démocraties : De nombreux pays autoritaires, comme la Corée du Nord et l’Afghanistan, se situent en bas du classement avec des scores inférieurs à 2. Ces régimes manquent totalement de libertés fondamentales.

Cette visualisation du rapport V-Dem 2025 illustre les profondes disparités régionales dans la distribution des régimes politiques à travers le monde. Les principales observations sont :
- L’Europe occidentale et l’Amérique du Nord constituent la région la plus démocratique, avec 82% de sa population vivant sous des démocraties libérales et aucune autocratie.
- L’Asie de l’Est et le Pacifique présente la plus forte proportion d’autocraties fermées (68%), principalement en raison de pays comme la Chine, la Corée du Nord et le Vietnam. Seulement 7% de sa population vit dans des démocraties libérales (Australie, Japon, Nouvelle-Zélande et Taïwan).
- Le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord reste la région la plus autocratique au monde, avec 98% de sa population vivant sous des régimes autocratiques et Israël comme seule démocratie (électorale) de la région.
- L’Asie du Sud et Centrale est dominée par les autocraties électorales (93%), comprenant des pays très peuplés comme l’Inde et le Pakistan.
- L’Europe de l’Est compte 65% de sa population vivant sous des autocraties électorales et abrite la Biélorussie, unique autocratie fermée d’Europe et la première depuis le début du 21e siècle.
- L’Amérique latine et les Caraïbes maintient un profil majoritairement démocratique (64% en démocratie électorale), mais avec une portion significative (22%) en « zone grise » démocratique, notamment due au Mexique.
- L’Afrique subsaharienne présente la plus grande diversité de régimes, avec 64% de sa population sous autocratie et 24% dans des démocraties électorales « grises » comme le Kenya, le Nigeria et la Zambie.
Les chercheurs de V-Dem constatent également que certains dirigeants instrumentalisent des mobilisations de masse contre la démocratie elle-même, comme l’illustre l’attaque du Capitole aux États-Unis.
Je rappelle que cette dernière étude de l’institut V-Dem ne prend pas en compte les évènements sous l’investiture de Trump en 2025. Cela sera le cas dans la prochaine édition. Cependant un article de CBC News dresse un portrait préoccupant de la situation démocratique aux États-Unis sous la présidence de Donald Trump en 2025. D’après Staffan Lindberg, directeur du projet V-Dem, « si ça continue comme ça, les États-Unis ne seront plus classés comme une démocratie » lors de la publication du prochain rapport annuel, allant jusqu’à affirmer que « la démocratie [là-bas] ne durera pas six mois de plus ».
Bien que le rapport actuel classe encore les États-Unis comme une « Démocratie libérale » (catégorie la plus élevée), il ne prend pas en compte les événements de 2025, notamment le début du nouveau mandat de Trump. L’article énumère plusieurs actions préoccupantes du président américain qui menacent les fondements démocratiques :
- La grâce accordée à 1 500 criminels qui l’ont soutenu
- Le licenciement de contrôleurs d’agences indépendantes sans procédure régulière
- La purge d’officiers de police et militaires apolitiques
- Le non-respect des lois et la suppression unilatérale de programmes fédéraux créés par le Congrès
- L’invalidation des pardons accordés par son prédécesseur
- Un discours partisan au Département de la Justice appelant à poursuivre les médias et certains adversaires
- Des menaces contre de nombreuses universités
- L’utilisation sans précédent d’une loi de guerre vieille de 227 ans en temps de paix (l’Alien Enemies Act de 1798) pour expulser des membres présumés de gangs sans procédure légale
Le plus inquiétant selon les experts est la rapidité de cette dérive autoritaire. Lindberg compare Trump à Erdoğan (Turquie), Orbán (Hongrie) et Modi (Inde), mais note qu’il procède beaucoup plus vite : « Il essaie de faire en quelques mois ce qui leur a pris 8 à 10 ans ».
Michael Miller, professeur à l’Université George Washington, qualifie déjà les États-Unis d’ « autocratie électorale » , un système où l’on peut voter et critiquer le gouvernement, mais où la crainte de représailles s’installe progressivement, conduisant à l’autocensure. L’article souligne l’importance cruciale des tribunaux dans cette confrontation, citant la Pologne, le Brésil, la Macédoine du Nord et la Zambie comme exemples où les tribunaux ont aidé à enrayer une dérive autoritaire.
Les dernières évolutions depuis mon dernier article
Il y a encore peu, les U.S.A se considéraient comme l’exemple du « monde libre » mais en à peine deux mois sous la gouvernance de Trump, les libertés fondent plus vite qu’un glacier en juillet. Chaque jour ajoutant son lot de dingueries, beaucoup de nouveaux éléments montrent la déliquescence de la démocratie Etats-Unienne depuis mon dernier article publié il y a moins de deux mois. Une espèce de série Netflix de mauvais gout dont l’enchainement effréné des épisodes finit soit par nous lasser, soit par nous donner la gerbe.
On impose son idéologie…
Le 9 mars 2025, Donald Trump a relayé sur son réseau social Truth Social, un article du Washington Times intitulé « Army recruitment ads look quite different under Trump » (Les publicités de recrutement de l’armée sont bien différentes sous Trump).
L’image partagée montre un téléviseur vintage affichant un triangle rose inversé barré d’un symbole d’interdiction rouge. Ce triangle rose est un symbole historiquement chargé, car il était utilisé par les nazis dans les camps de concentration pour identifier et persécuter les hommes homosexuels et les femmes transgenres.
Cette publication s’inscrit dans une série de mesures prises par l’administration Trump contre la communauté LGBTQIA+, notamment:
- Des plans pour expulser les militaires transgenres de l’armée américaine, sauf exemption spéciale du département de la Défense
- La signature d’ordres exécutifs stipulant que le gouvernement américain ne reconnaît que deux sexes, masculin et féminin
- Une « politique de refonte des efforts de diversité, d’équité et d’inclusion » (DEI) dans l’armée, menée par le Secrétaire à la Défense Pete Hegseth
Et ce n’est pas la première fois. Pour sa campagne présidentielle de 2020, des publicités avait déjà diffusées sur Facebook comportant un triangle rouge, symbole également utilisé par les nazis pour identifier les prisonniers politiques dans les camps.
Le 3 Avril 2025, Trump a viré six membres du Conseil de sécurité nationale (organe central & stratégique) sur les « conseils » de Laura Loomer, une influenceuse complotiste d’extrême droite.
L’administration Trump attaque des cabinets d’avocats…
Pour la sixième fois, l’administration Trump punit un cabinet – cette fois Susman Godfrey – pour avoir défendu des clients et des causes qui lui déplaisent : à ce rythme, il va bientôt falloir ouvrir une section « représailles juridiques » au barreau
… des journalistes…
Trump a annoncé qu’il lançait une action en justice contre Paramount, CBS et son programme d’information « 60 Minutes », réclamant 20 milliards de dollars pour ce qu’il qualifie d’interférence électorale et de reportages frauduleux.
… Et des juges !
Aux États-Unis, la livraison de pizzas est récemment devenue un outil d’intimidation privilégié contre les juges. Loin d’être une simple farce nocturne, ces commandes non sollicitées – souvent envoyées tard dans la nuit – visent à rappeler aux magistrats que leur adresse est connue, dans un contexte où plusieurs d’entre eux ont eu l’audace de contrarier l’administration Trump ou ses soutiens les plus fervents. Les familles des juges ne sont pas épargnées, certains recevant des pizzas au nom de Daniel Anderl, fils d’une juge fédérale assassiné en 2020, histoire de bien enfoncer le clou du message sinistre. Cette méthode s’ajoute à d’autres formes d’intimidation, comme les fausses alertes à la bombe ou le « swatting », démontrant que l’imagination des fauteurs de troubles n’a d’égal que leur absence de scrupules.
JD Vance toujours en chasse des idées progressistes ⬇️
Keith Self prend modèle sur Joseph Goebbels
Le 2 avril 2025, lors d’une réunion d’une sous-commission des relations étrangères de la Chambre des représentants, le représentant républicain texan Keith Self, a cité Joseph Goebbels, ministre de la Propagande d’Adolf Hitler, par ces mots: « Une citation directe de Joseph Goebbels : ‘C’est le droit absolu de l’État de superviser la formation de l’opinion publique’, et je pense que c’est peut-être ce dont nous discutons ici. »
Cette audition était censée examiner l’existence d’un prétendu « complexe industriel de censure » que l’administration Biden aurait mis en place pour restreindre les voix conservatrices sur les réseaux sociaux. Citer le maître de la propagande nazie pour défendre la liberté d’expression… Du grand art !
Imposer son idéologie aux autres pays
Un courrier de l’ambassade des Etats-Unis demande aux sociétés françaises de prouver qu’elles ne mettent pas en œuvre de programmes de promotion de la diversité, de l’équité, et de l’inclusion qui enfreignent les lois fédérales, sous peine de ne pas pouvoir travailler avec le gouvernement américain.
Une enseignante de Floride licenciée pour avoir utilisé le prénom préféré d’un élève transgenre
Melissa Calhoun, enseignante dans le comté de Brevard depuis 11 ans, a perdu son emploi après avoir appelé un élève par le prénom avec lequel ce dernier souhaitait être nommé, sans autorisation parentale. C’est le premier licenciement connu résultant de la campagne antiprogressiste visant à limiter la reconnaissance des identités transgenres dans les écoles – une politique initiée en Floride qui s’est étendue à d’autres États républicains et reprise par l’administration Trump.
L’enseignante a enfreint une règle de l’État qui interdit au personnel scolaire de s’écarter des noms légaux des élèves sans autorisation écrite des parents. Cette règle s’applique aux élèves qui choisissent un nom alternatif en raison d’un changement d’identité de genre, ainsi qu’à ceux qui souhaitent utiliser un surnom.
Lorsque certains professeurs en arrivent à se poser la question de s’auto-censurer, c’est que la dérive fasciste est déjà profonde !
L’État demande aux employés de dénoncer les uns, les autres, pour « préjugés antichrétiens »
L’administration Trump se met à encourager la délation anonyme pour traquer le moindre soupçon d’“anti-Christian bias”, on se demande si la prochaine étape sera la distribution de bonnets rouges façon “Handmaid’s Tale”…
Expulsion de tout étranger ou militant « woke »
Le pays a aussi réussi à refouler un scientifique français pour ses opinions anti-Trump (le crime ultime : avoir osé critiquer le grand leader dans ses messages privés), tout en transformant Guantánamo en centre de rétention géant pour migrants. Entre les expulsions et les arrestations de manifestants notamment celle de Mahmoud Khalil, un étudiant pro-palestinien de l’université Columbia, le pays redéfinit allègrement le concept d’État de droit.
Quelques semaines plus tard, un juge de l’immigration de Louisiane a autorisé l’administration Trump à poursuivre ses efforts pour expulser le militant de l’Université Columbia, sous prétexte qu’il représenterait un risque pour la politique étrangère des États-Unis.
Le mardi 25 mars, Rumeysa Ozturk, une doctorante turque de l’université Tufts, a été arrêtée par les autorités fédérales américaines à l’extérieur d’un appartement hors campus à Somerville dans le Massachusetts pour avoir co-signé en mars 2024, un article dans le journal universitaire « Tufts Daily » critiquant la réponse de l’université aux appels des étudiants à se désinvestir des entreprises ayant des liens avec Israël.
Une demi-douzaine d’agents en civil et masqués ont menotté l’étudiante qui criait, avant de l’emmener dans un SUV. La scène a été filmée ⬇️
Les arrestations vont bon train avec pas moins de 32 809 arrestations au cours des 50 premiers jours de l’administration Trump.
Depuis peu, des centaines d’étudiants internationaux aux États-Unis reçoivent des emails du Département d’État américain (DOS) leur demandant de s’auto-expulser en raison de leur activisme sur les campus. Cette mesure touche non seulement ceux qui ont physiquement participé à des manifestations, mais aussi ceux qui ont simplement partagé ou aimé des publications considérées comme « anti-nationales » sur les réseaux sociaux.
Salvador, nouvelle terre promise… pour les criminels américains ?
Lors de sa rencontre du 14 avril 2025 avec Nayib Bukele, le président autoproclamé « dictateur le plus cool du monde », Trump a lancé, tout sourire : « Home-growns are next. The home-growns. You gotta build about five more places. It’s not big enough. » Traduction : après avoir expédié des migrants indésirables, pourquoi ne pas envoyer aussi les criminels made in USA dans les méga-prisons salvadoriennes, quitte à en construire quelques-unes de plus pour l’occasion ? Bukele, ravi, a acquiescé, prêt à accueillir la future exportation américaine.
Si Trump assure que la légalité de cette brillante idée est à l’étude, les experts juridiques, eux, s’étouffent déjà : déporter des citoyens américains, même très turbulents, relève du fantasme constitutionnel et flirte dangereusement avec la violation des droits humains. Mais qu’importe ! Dans la nouvelle entente ultra-répressive entre Washington et San Salvador, il semble que la surpopulation carcérale et les « trous noirs » juridiques soient des détails logistiques, à régler à coups de béton et de slogans musclés. Reste à savoir si le Salvador deviendra le Guantanamo XXL dont Trump rêve tout haut… ou juste le décor d’un nouveau feuilleton politico-judiciaire à l’américaine.
Un tweet, un sourire, et hop, bienvenue chez Trump !
Ajoutons à ce tableau le chantage aux cartes vertes : désormais, pour devenir résident américain, mieux vaut avoir tweeté des louanges au Grand Leader, sous peine d’expulsion express.
Elon Musk, chef d’orchestre de la censure turque
Elon Musk, bienveillant gardien de la liberté d’expression, qui suspend sur X les comptes critiques du régime turc – une façon élégante d’exporter l’autoritarisme en kit.
On s’installe à vie comme Poutine
Pendant ce temps, Trump, toujours prompt à défendre l’intégrité électorale… dès lors qu’elle lui est favorable, signe un décret pour « réformer » un système électoral qu’il juge (quelle surprise) truqué contre lui – Et tant qu’il y est, voudrait briguer un troisième mandat à la Maison Blanche, bien que ce soit interdit par la Constitution en vertu du 22e amendement.
… Et on réécrit l’Histoire !
Ira Hayes, un Marine amérindien de la nation Pima, est célèbre pour avoir participé à l’emblématique photo de levé du drapeau américain sur l’île d’Iwo Jima en 1945, immortalisée par Joe Rosenthal. Cette image, devenue symbole de la victoire alliée dans le Pacifique, lui a valu une reconnaissance nationale et inspire encore le Mémorial des Marines à Arlington.
En mars 2025, l’administration Trump a ordonné la suppression des références à son histoire sur les sites du Département de la Défense, dans le cadre d’une purge des politiques d’équité et d’inclusion. Les pages le concernant, ainsi que celles des Navajo Code Talkers, ont été retirées via un processus automatisé selon les directives du secrétaire à la Défense Pete Hegseth.
Face aux critiques, le Pentagone a partiellement restauré les contenus concernant Hayes, Cependant, le texte de la
version restaurée présentait plusieurs différences par rapport à la page originale . Plus précisément, de nombreuses références à l’origine ethnique de Hayes avaient été supprimées ou reformulées.
Le Pentagone, encore lui, s’active à effacer les documents sur la Shoah – parce que rien ne consolide mieux la démocratie qu’un peu d’amnésie historique. À Columbia, les masques sont interdits : exit les immunodéprimées, place à la traque des dissidents.
Comme vient de le titrer « The New York Times » :
Alors que l’administration Trump retire les sites Web et les données du gouvernement hors ligne, elle supprime de manière sélective les archives publiques, laissant le président déclarer sa propre version de l’histoire, ont déclaré des archivistes et des historiens.
Quand la censure trumpienne ravive les flammes du passé
Dans un élan de nostalgie autoritaire, l’administration Trump orchestre une purge littéraire qui ferait rougir les pyromanes du Troisième Reich. Près de 400 ouvrages sur la diversité, le racisme ou l’histoire de l’Holocauste ont été discrètement évacués des rayonnages de l’Académie navale américaine, sur ordre d’un décret présidentiel visant à « éradiquer l’endoctrinement radical ». Pendant que les classiques de Maya Angelou ou d’Ibram X. Kendi disparaissent, des titres ouvertement suprémacistes ou même le tristement célèbre Mein Kampf restent sagement en place, comme pour rappeler que certaines idées nauséabondes ne dérangent décidément personne au sommet. Les autodafés d’antan se faisaient à la flamme, ceux d’aujourd’hui préfèrent la bureaucratie, mais la logique reste la même : faire taire ce qui dérange, quitte à piétiner la liberté d’expression et la mémoire collective. Les historiens et défenseurs des droits humains ne s’y trompent pas : ce genre de chasse aux sorcières littéraire évoque furieusement les heures les plus sombres du XXe siècle, où l’on brûlait les livres avant de s’en prendre aux idées… et aux gens.
Une volonté de censure qui se propage jusqu’en Grande Bretagne ?
Pas de thermomètre, pas de problème de température
En trois mois à la Maison-Blanche, l’administration Trump semble avoir trouvé la recette miracle pour lutter contre le changement climatique : fermer les yeux et couper les budgets. Entre la suppression de plus de 25 % du financement de la NOAA – l’agence qui, ô surprise, mesure précisément l’état du climat et des océans – et la dissolution pure et simple de ses divisions de recherche, il devient soudainement beaucoup plus facile de nier la crise climatique quand on ne collecte plus de données pour la prouver. Ajoutez à cela la réouverture de vastes réserves marines à la pêche industrielle, la réduction des examens environnementaux à une formalité expédiée en moins d’un mois pour les projets miniers et énergétiques, et la relance du charbon comme fleuron national, et vous obtenez un cocktail explosif pour la biodiversité et le climat, mais ô combien rentable pour les industries polluantes. Les États qui tentent de résister avec des lois climatiques locales se voient menacés d’actions fédérales pour entrave à la « liberté énergétique » américaine. Bref, pour l’administration Trump, le problème du climat n’existe plus : il suffit de supprimer ceux qui le mesurent, et le tour est joué.
Pour le résumé des épisodes précédents dans ce domaine, voir mon article de Février ⬇️
Un ministère de l’éducation ? Pourquoi faire ?
Cerise sur ce gâteau autocratique : Trump démolit le ministère de l’Éducation – pourquoi financer des écoles quand on peut fabriquer des électeurs dociles ?
Avertissements aux voyageurs vers les États-Unis
Plusieurs pays avertissent leurs citoyens lors de leurs voyages aux États-Unis, désormais classés zone à risque pour les étrangers. Parmi ces pays: le Royaume-Uni, l’Allemagne, la Finlande, le Danemark, le Royaume-Uni, la France et le Canada.
Trump vient au secours d’Elon Musk…
Depuis que tout le monde (ou presque) a compris qu’Elon Musk était un néo-nazi (si ce n’est pas le cas lisez mon précédent article), de plus en plus de personnes à travers la planète, boycottent les véhicules Tesla du milliardaire.
Papa Trump, en bon dictateur, vient à la rescousse du petit Elon, en qualifiant d’ « illégal » le boycott des véhicules Tesla.
Dans un message posté sur Truth Social le 11 mars 2025, Trump a affirmé que « les Radicaux de Gauche » tentaient « d’illégalement et de manière complice boycotter Tesla ». Il a également annoncé qu’il allait acheter une Tesla pour soutenir Elon Musk, qui dirige son Département de l’Efficacité Gouvernementale (DOGE).
Je vous laisse admirer sa délicatesse légendaire ⬇️
… Et mange dans la main de Poutine…
Quant à la lutte contre la désinformation russe, elle est suspendue – après tout, pourquoi contrarier Poutine quand on peut imiter ses méthodes ? Les U.S.A semblent avoir trouvé un nouveau slogan : Make Autocracy Great Again, avec l’aval enthousiaste de Bibi Netanyahu, qui salue son plan « révolutionnaire et créatif » de transférer la population de Gaza vers d’autres pays (Égypte, Jordanie) comme on déplacerait de la marchandise d’un entrepôt à un autre… Et bien content des sanctions américaines contre la Cour pénale internationale (CPI), qui a émis un mandat d’arrêt contre lui pour crimes de guerre.
Ed Martin, un candidat nommé par Trump Pro-Poutine et antiprogressiste qui attaque Wikipedia et des revues scientifiques
Ed Martin, militant antiprogressiste qui a défendu Les émeutiers du 6 janvier et a soutenu les revendications de une élection volée en 2020 et ancien président du Parti républicain du Missouri, a été nommé procureur américain par intérim pour le district de Columbia dès la deuxième investiture de Trump le 20 janvier 2025, et occupe ce poste par intérim depuis.
Il est accusé d’avoir tenu des propos racistes sur les réseaux sociaux et d’être apparu dans des programmes de propagande russe⬇️
Martin a envoyé un courrier daté du 24 avril 2025 à la Fondation Wikimedia, exigeant des réponses sous trois semaines sur des accusations de manipulation d’information et de propagande sur Wikipédia, menaçant potentiellement son statut fiscal avantageux.
La lettre comprend douze questions détaillées, notamment sur les mécanismes de lutte contre la propagande, les effectifs et moyens de modération, l’influence des donateurs, la gestion des biais éditoriaux, et l’anonymat des contributeurs. Il demande des comptes sur les six dernières années d’allégations de manipulation de contenu.
Une attaque de plus de la part d’antiprogressistes contre Wikipédia, après celles de figures comme Elon Musk, d’organisations comme The Heritage Foundation et de media comme Le Point.
Martin est connu pour ses menaces juridiques, à peine justifiées, contre les médias. Ces derniers jours, il a adressé des lettres au New England Journal of Medicine , au CHEST Journal et à Obstetrics and Gynecology , les accusant de « partialisme dans divers débats scientifiques ». (The Verge)
Des experts, comme Amanda Shanor, spécialiste du Premier Amendement à l’Université de Pennsylvanie, soulignent que les revues scientifiques bénéficient des mêmes protections constitutionnelles que les journaux, rendant ces pressions problématiques. Certains, comme Jeremy Berg, ancien rédacteur en chef de Science, craignent que ces lettres visent à pousser les revues à publier des articles alignés sur les vues de l’administration actuelle, même si leur qualité scientifique est douteuse.
Donald Trump, qui voit certainement Vladimir Poutine comme un exemple, n’hésite pas à reprendre à son compte le récit du dictateur russe en affirmant que l’Ukraine devrait céder la Crimée pour obtenir la paix, arguant que Kiev ne l’aurait « pas vraiment défendue » en 2014 – une affirmation qui fait fi du droit international et du fait que la Crimée a été annexée illégalement par la Russie. Trump va jusqu’à accuser l’Ukraine d’avoir déclenché la guerre à cause de ses ambitions de rejoindre l’OTAN, reprenant mot pour mot la rhétorique du Kremlin.
Pour couronner le tout, l’homme qui promettait de « régler la guerre en Ukraine en 24 heures » a finalement admis, du bout des lèvres, qu’il s’agissait d’une « exagération » ou d’une « plaisanterie »
Non seulement il n’hésite pas à réécrire l’histoire, mais il n’hésite même plus à avouer mentir, actant que les faits et les promesses font partie d’une époque révolue.
… Avant de se rendre compte qu’il s’est fait berner
Jusqu’à ce que la Realpolitik trumpienne, découvre enfin que négocier avec Poutine ressemble à un concours de poker face à un maître du double jeu. Après avoir repris docilement le récit russe, traité le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, de « dictateur sans élection » , voilà que l’expert en « deals » se rend compte que son homologue moscovite le promène dans une danse du mépris – entre « administration transitoire » fantôme et frappes énergétiques « accidentelles ». L’homme qui se vantait de régler la guerre « en 24 heures » menace désormais de taxes sur le pétrole… Comme si Poutine n’avait pas déjà pris ses dispositions dans ce domaine ! C’était écrit d’avance, il n’y avait que Trump pour se croire plus malin que le dictateur sur qui il prend modèle.
Mais l’ « agent orange » continue de nier avoir été manipulé par Poutine alors que la Russie enchaine les attaques malgré les prétendus accords de trêves négociés.
Intensification de ses menaces envers le Groenland…
… A nouveau contre le Panama…
Le dernier accord Panama–États-Unis permet aux troupes américaines de revenir s’installer le long du canal, mais rassurez-vous : il ne s’agit pas de “bases permanentes”, juste d’une influence militaire renouvelée sur des sites historiques, histoire de rappeler à Panama que sa souveraineté reste, disons, très négociable.
… Mais aussi contre l’Iran !…
Donald Trump menace d’une action militaire contre l’Iran concernant le nucléaire. « S’il faut recourir à la force, nous recourrons à la force« , a-t-il déclaré, précisant qu’Israël serait « chef de file« . Cette menace survient avant des discussions prévues samedi à Oman entre l’émissaire américain Steve Witkoff et le ministre iranien Abbas Araghchi. Trump avait déjà adressé une lettre à l’Iran en mars appelant à des négociations, tout en menaçant de bombardements en cas d’échec diplomatique.
… Et bien sûr le Canada
Face aux menaces tonitruantes de Donald Trump, qui rêve tout haut d’annexer le Canada ou de ruiner son industrie automobile à coups de taxes, les Canadiens se sont soudainement découverts un patriotisme électoral inattendu. Mark Carney, jusque-là outsider d’un Parti libéral en perte de vitesse, a vu sa cote grimper à mesure que Trump multipliait les déclarations provocatrices sur Truth Social, allant jusqu’à qualifier la frontière canado-américaine de « ligne artificielle ». Résultat : les électeurs, peu enclins à devenir le « 51e État » ou à voir leur économie bradée, ont offert à Carney une victoire inespérée, tout juste sous la majorité absolue. Comme quoi, rien de tel qu’un voisin bruyant pour ressouder une nation et transformer une élection moribonde en sursaut d’orgueil national.
Le culte de la personnalité
Le « Grand Leader » a dévoilé une « Gold Card » à son effigie permettant d’obtenir un visa permanent aux États-Unis contre la modique somme de 5 millions de dollars (4,5 millions d’euros). L’immigration: Ok mais pas n’importe laquelle !
Et cette scène qui vient d’avoir lieu le 1er Mai, ce n’est pas le symbole même du culte de la personnalité ?
Plus dangereux qu’une Dictature ? Une dictature dirigée par des branques ?
Un groupe Signal mal formé, un conseiller bien évincé
L’administration Trump a accidentellement inclus un journaliste dans une conversation Signal sur des frappes militaires au Yémen. Jeffrey Goldberg, rédacteur en chef de The Atlantic, a reçu des messages détaillant les plans d’attaque deux heures avant leur exécution, incluant des informations sensibles sur les cibles et les armes. Les hauts responsables, dont le conseiller à la sécurité nationale Michael Waltz et le secrétaire à la Défense Pete Hegseth, ont discuté ouvertement de l’opération sans remarquer la présence du journaliste.
Les échanges du groupe Signal ont révélé un mépris cinglant envers l’Europe, qualifiée de « charge » par le vice-président JD Vance, qui déplorait devoir « encore une fois renflouer » des alliés jugés « pathétiques » et « profiteurs ». Les messages, bourrés de détails opérationnels compromettants, décrivaient minutieusement les cibles, les créneaux d’attaque et les types d’armes déployées contre les Houthis — informations partagées avec une légèreté confondante deux heures avant les frappes. Les responsables ont exposé des données sensibles sur des unités militaires et des opérations en cours, au point qu’un juge fédéral a dû ordonner la préservation des messages. La réaction de ces branques ? S’en prendre au journaliste en question qui a été le seul à faire son boulot correctement et qui leur a mis la honte internationale…
Ironie suprême, ces mêmes dirigeants qui avaient hurlé au scandale sur les emails de Clinton ont bafoué les protocoles de sécurité, discutant bombardements et calculs géopolitiques sur une appli grand public, comme s’il s’agissait d’organiser un dîner entre amis.

Mike Waltz a admis avoir lui-même créé le groupe de discussion Signal. Malgré ses tentatives d’explication, Waltz a dû endosser « l’entière responsabilité » de cette fuite embarrassante. Résultat : il a été promptement évincé de son poste de conseiller à la sécurité nationale.
Le feuilleton pathétique des droits de douane
Il y a quelques semaines, Donald Trump a annoncé des droits de douane délirants à presque toute la planète. Presque car comme par hasard, la Russie n’est pas concernée.
Ces derniers ne reposent sur rien de logique ⬇️
Il a par exemple fixé les droits de douane à l’Union Européenne et donc à la France à 20%, sauf qu’il ne doit pas être au courant que St-Pierre-et-Miquelon, La Réunion, la Polynésie française, la Guadeloupe, la Martinique, Mayotte, et la Guyane française sont aussi français…
Mais il y a mieux, accrochez-vous !
Il a également imposé des taxes aux « British Indian Ocean Territory » , qui appartiennent au Royaume-Uni et dont la seule île habitée est Diego Garcia, une base militaire… Américaine…
Vous vous dites que là il est max de sa stupidité ? Détrompez-vous ! Il a imposé des droits de douane aux îles Heard et McDonald, peuplées uniquement de… Manchots ! Voilà, voilà…
Les effets ne se sont pas fait attendre et semblent déjà se retourner contre son pays pendant que lui joue au golf, l’air serein.
Les élites économiques se mordent déjà les doigts d’avoir soutenu Trump
Dans mon précédent article, dans le paragraphe « Le voile de l’incrédulité : pourquoi nous refusons de voir le fascisme qui s’avance », je disais que le déni existait chez les élites économiques qui, historiquement, ont souvent soutenu les régimes fascistes naissants, convaincues qu’elles pourraient les « contrôler » tout en bénéficiant de leur politique économique.
Eh bien ces dernières n’ont pas mis longtemps à se rendre compte des effets néfastes de l’instabilité et du manque de profondeur de l’intellect de Donald Trump. Elles en sont déjà à regretter de l’avoir soutenu.
La bonne entente avec Trump touche t-elle déjà à sa fin ?
Même au sein de son parti, ces droits de douane font grincer des dents jusqu’à son petit protégé Musk qui « imagine une « zone de libre-échange entre l’Europe et l’Amérique du Nord » entraînée par l’instauration de « droits de douane nuls » » .
Il est allé jusqu’à traiter le conseiller au commerce de Trump de « crétin » ⬇️
Puis subitement: « Donald Trump annonce une pause de 90 jours dans les nouveaux droits de douane (tous les pays seront taxés à 10%), à l’exception de la Chine, dont les droits de douane passent à 125% » ⬇️
Et à quel moment Jamieson Greer, le « négociateur en chef » pour le commerce de l’administration Trump a t-il appris ce revirement de Trump ? Pendant son audition à la Chambre des Représentants… Oui, oui, la personne qui devrait être en charge de ces droits de douane, l’a appris en même temps que le reste du monde et se mange la honte en pleine audition ⬇️
Trump coupable d’un délit d’initié ?
Mais il y a peut-être pire ! Selon certains analystes, « plusieurs signaux laissent penser à une manipulation des cours qui a profité à certains proches de l’administration Trump« ; Unusual Whales, un expert reconnu ajoute: « Je pense que les gens étaient au courant de la pause tarifaire et l’avaient négociée à l’avance. Vous pouvez voir qu’avant que Trump ne dise d’acheter sur Truth Social, les traders ont ouvert les appels à investir ». Il pourrait donc y s’agir d’un délit d’initié !
Fin du Game pour le génie de l’entourloupe, Elon Musk ?
Difficile de trouver un meilleur cas d’école pour illustrer la collision entre promesses tapageuses et réalité administrative que l’épisode DOGE, ce « Department of Government Efficiency » censé porter la vision disruptive d’Elon Musk à la tête de l’État américain. Résultat ? Un fiasco retentissant : À l’arrivée ? 150 petits milliards, soit seulement 7.5% des 2 000 milliards de dollars d’économies annoncées au départ. De plus, selon un décompte précis du New York Times, même ces 150 milliards sont contestés, car une partie des économies affichées est soit exagérée, soit fictive, certains contrats annulés n’ayant jamais existé ou ayant déjà été supprimés avant l’arrivée de Musk.
Sans compter des méthodes de management ubuesques (comme exiger cinq accomplissements hebdomadaires sous peine de sanctions, initiative vite désavouée par l’administration), et une gouvernance qualifiée d’instable par les experts en cybersécurité. Pendant que Musk brandissait la tronçonneuse auprès de l’extrême droite argentine, Tesla sombrait dans la crise, avec des ventes en chute libre et une image de marque en lambeaux. Les analystes sont formels : Musk quitte (ou s’éloigne temporairement de) la politique non par grandeur d’âme, mais parce que Tesla est en « code rouge » et qu’il faut éteindre l’incendie qu’il a lui-même allumé. Au final, DOGE n’aura été qu’une parenthèse de plus dans le feuilleton chaotique d’Elon Musk, où la communication l’emporte toujours sur les résultats.
Le pays qui préfère faire travailler les enfants que des immigrés
En Floride, la pénurie de main-d’œuvre causée par l’expulsion des travailleurs sans papiers inspire une solution pour le moins rétro : remettre les enfants au travail, dès 14 ans, y compris la nuit et pendant les jours d’école, tout en supprimant les pauses repas obligatoires pour les 16-17 ans. Ce projet de loi, soutenu par le gouverneur Ron DeSantis, vise à combler les postes peu attractifs laissés vacants dans l’agriculture, la restauration ou l’hôtellerie, secteurs peu réputés pour leur glamour ou leurs salaires. Les défenseurs du texte invoquent la nostalgie d’une époque où « les jeunes travaillaient dans les stations balnéaires », tandis que les opposants rappellent que les infractions au droit du travail des enfants ont presque triplé ces dernières années en Floride, et que cette dérégulation mettrait sérieusement en péril la santé, l’éducation et le bien-être des adolescents. Lorsqu’on est prêt à revenir à des époques peu glorieuses pour la protection des mineurs, pour ne pas faire travailler des immigrés, a t-on besoin d’une autre preuve de racisme de ce gouvernement ?
Chasser les immigrés pour mieux les rappeler ?
En attendant de pouvoir faire travailler les enfants, il fallait bien se rendre à l’évidence. Malgré ses rodomontades sur les expulsions massives, Donald Trump avoue soudain que les travailleurs immigrés, qu’il voulait renvoyer manu militari, sont en fait indispensables pour faire tourner les fermes et les hôtels américains. Après avoir promis la plus grande opération d’expulsion de l’histoire, le voilà qui propose que les employeurs puissent faire revenir « légalement » leurs employés sans papiers… à condition qu’ils partent d’abord « gentiment » et qu’ils aient une lettre de recommandation. Un coup de génie : vider les champs et les cuisines, puis supplier que la main-d’œuvre revienne, histoire de ne pas voir les prix flamber et les récoltes pourrir. Même les syndicats agricoles, rappellent que sans ces travailleurs, l’économie s’effondre, et que la régularisation serait une solution bien plus rationnelle. Bref, Trump, champion du « America First », découvre que l’Amérique ne se nourrit pas de slogans, mais du travail de ceux qu’il voulait faire disparaître.
Existe-t-il encore un contre-pouvoir aux U.S.A ?
S’il existe, il ne se manifeste pas souvent et/ou de manière trop timoré. Plus grand chose ne semble pouvoir freiner la marche en avant vers le fascisme trumpien. De temps en temps quelqu’un ose encore s’imposer comme ce juge fédéral qui ordonne à l’administration Trump de faire revenir aux Etats-Unis un homme expédié « par erreur » dans la sinistre prison du Salvador.
Abrego Garcia: l’expulsion qui n’aurait jamais dû avoir lieu
L’affaire Kilmar Abrego Garcia, c’est l’histoire d’une « erreur administrative » qui met en lumière, la faiblesse, chaque jour un peu plus grande, des contre-pouvoirs sous l’administration Trump.
Résumons : Abrego Garcia, Salvadorien arrivé aux États-Unis à 16 ans pour fuir les gangs, vivait légalement dans le Maryland avec sa femme et ses enfants américains, protégé par une décision de justice contre toute expulsion vers son pays d’origine à cause des risques de persécution. Mais en mars 2025, l’administration Trump, dans sa croisade anti-immigration, le déporte tout de même vers le Salvador, où il est jeté sans procès dans la prison de haute sécurité CECOT, célèbre pour ses conditions inhumaines, au motif qu’il serait membre du gang MS-13-accusation jamais prouvée, jamais jugée, et basée sur des indices aussi solides qu’un sweat à capuche et une casquette Chicago Bulls.
Les tribunaux américains, du district du Maryland jusqu’à la Cour suprême, confirment l’illégalité de la déportation et ordonnent son retour, mais la Maison Blanche s’entête, arguant qu’elle n’a plus la main sur le dossier une fois Abrego Garcia hors du territoire, tout en multipliant les déclarations tonitruantes sur ses prétendus liens avec le terrorisme. Le Salvador, ravi de facturer l’incarcération de déportés américains à prix d’or, refuse de le libérer, et le président Bukele se paie même le luxe de moquer la situation lors de sa visite à Washington, tandis que Trump et ses alliés s’enfoncent dans la mauvaise foi, allant jusqu’à publier des photos de tatouages « suspects » et à comparer Abrego Garcia à Oussama ben Laden.
Au passage, l’affaire vire à la crise constitutionnelle : l’administration fédérale défie ouvertement les ordres des juges, les avocats d’Abrego Garcia crient au scandale, et les opposants politiques dénoncent un dangereux précédent pour l’État de droit. Les études et analyses juridiques, tout comme les décisions de justice, confirment l’illégalité de la procédure et l’absence de preuves tangibles contre Abrego Garcia, tandis que la communication gouvernementale s’enlise dans les demi-vérités et la désinformation. Bref, un cas d’école de la politique du « faites ce que je dis, pas ce que je fais », où la réalité juridique et humaine est sacrifiée sur l’autel de la communication politique et du spectacle sécuritaire.
BUKELE : Comment puis-je faire entrer clandestinement un terroriste aux États-Unis ? Bien sûr que non. La question est absurde.
TRUMP : Ce sont des malades.
Quand l’Amérique expulse ses propres enfants malades : la politique migratoire au sommet de l’inhumanité
L’administration Trump vient d’atteindre un record d’ignominie : expulser trois enfants américains, dont un de quatre ans atteint d’un cancer métastasé, vers le Honduras avec leurs mères immigrées clandestines, sous prétexte de politique migratoire musclée. Peu importe que la loi américaine interdise formellement l’expulsion de citoyens américains, ou qu’un juge fédéral s’inquiète de l’absence de toute procédure digne de ce nom : la Maison-Blanche, sûre d’elle, affirme que tout cela s’est fait à la demande des mères, sans daigner fournir la moindre preuve convaincante. Résultat : un enfant malade expulsé sans traitement, une mère enceinte sans garantie de suivi médical, et des associations de défense des droits qui crient au scandale devant ce que la justice elle-même qualifie d’« illégal » et « inconstitutionnel ». Mais après tout, quand on prétend sauver l’Amérique d’une « invasion de criminels », expulser ses propres enfants malades, c’est sûrement une preuve de grandeur nationale…
Harvard, première victime du feuilleton “Déwokisons l’Amérique”
Harvard, jadis temple de l’élite intellectuelle américaine, est désormais la bête noire de l’administration Trump, qui voit dans ses amphithéâtres un « foutoir progressiste » et une « menace pour la démocratie ». Pourquoi tant de haine ? Tout a basculé après les manifestations étudiantes pro-palestiniennes d’octobre 2023, que Trump et ses alliés ont rapidement qualifiées de « propagande antisémite ». Prétextant la lutte contre l’antisémitisme, la Maison Blanche a exigé de Harvard la suppression de ses politiques de diversité, un audit idéologique de ses programmes et même une réduction du nombre d’étudiants étrangers.
Harvard a refusé net, préférant la défense de la liberté académique à la soumission politique, ce qui lui a valu un gel immédiat de 2,2 milliards de dollars de subventions fédérales et la menace d’être privée d’étudiants internationaux. Derrière cette croisade, Trump cherche à faire plier les bastions du progressisme universitaire, accusés de fabriquer des « communistes », et de saper l’Amérique traditionnelle. Bref, Harvard est devenue l’exemple à abattre pour un président qui rêve de « déwokiser » l’enseignement supérieur, quitte à transformer le débat académique en chasse aux sorcières jusqu’à la qualifier d’ « institution antisémite ».
Le 20 avril, il a été révélé que l’administration exigeait aussi l’accès à des rapports internes sur l’antisémitisme et les biais anti-musulmans depuis octobre 2023. Harvard a déposé une plainte le 21 avril, et sept experts juridiques ont estimé que l’université avait de fortes chances de succès en cour. Enfin, le 28 avril, un juge fédéral a accepté d’accélérer le procès, fixant une audience au 21 juillet, tandis que le gel des fonds semble devoir perdurer jusque-là.
Le FBI de Kash Patel arrête les juges récalcitrants
Sous la houlette de Kash Patel, le FBI a arrêté, le 25 avril 2025, la juge Hannah Dugan dans le Wisconsin, accusée d’avoir gêné des agents fédéraux lors de l’arrestation d’un migrant, marque un franchissement de ligne rouge rarement observé dans une démocratie digne de ce nom. Mais fallait-il s’attendre à autre chose de la part d’un directeur du FBI qui, non content d’avoir défendu avec ferveur les émeutiers du Capitole du 6 janvier 2021 – ces « patriotes » qui ont tenté de renverser le Congrès – s’est aussi illustré par son soutien appuyé à la mouvance complotiste QAnon, réputée pour ses fantasmes autoritaristes et son mépris des institutions ? Les démocrates, qui redoutaient de voir le FBI transformé en bras armé des vengeances trumpistes, ont vu leurs craintes se réaliser.
Protéger la presse ? Seulement quand ça arrange le pouvoir
Le gouvernement américain vient de donner une leçon magistrale sur la protection des sources… en décidant tout simplement de la supprimer. En révoquant la politique de Merrick Garland, qui protégeait les journalistes contre les demandes secrètes du gouvernement pour accéder à leurs appels, emails et autres documents, la nouvelle procureure générale Pam Bondi redonne au ministère de la Justice le droit de fouiller dans les communications de la presse et de forcer les journalistes à témoigner pour identifier leurs sources. Un geste fort pour la transparence, à condition de considérer que la transparence ne concerne que les journalistes, pas le pouvoir.
Le DOGE, la Sécurité sociale et le Retour du Contre-pouvoir
Sous prétexte de lutter contre une fraude à la Sécurité sociale que personne n’a encore vue autrement que dans les discours de l’administration Trump et du DOGE, une commission menée par Elon Musk a tenté d’obtenir un accès sans précédent aux données personnelles de millions d’Américains. Heureusement, la juge fédérale Ellen Hollander a émis une injonction préliminaire les empêchant « d’accéder à des informations confidentielles, comme les dossiers médicaux, relevés bancaires ou bulletins de salaire. La Sécurité sociale, une agence fédérale notamment chargée de verser les retraites, pourra uniquement fournir des données anonymisées aux équipes du DOGE » .
Si le gouvernement brandit la menace de pensions versées à des morts, il oublie de fournir des preuves solides pour étayer ses affirmations. Dans ce cas, pour une fois, un contre-pouvoir a fonctionné face à l’administration Trump.
Résumé des signes, comportements et actes qui se rapportent au Fascisme, au Nazisme et à l’Autocratie dans l’Administration Trump 2025
Attaques contre les institutions démocratiques
- Licenciement de contrôleurs d’agences indépendantes sans procédure régulière
- Non-respect des lois et suppression unilatérale de programmes fédéraux créés par le Congrès
- Invalidation des pardons accordés par son prédécesseur
- Volonté de briguer un troisième mandat présidentiel malgré l’interdiction constitutionnelle (22e amendement)
- Démolition du ministère de l’Éducation
- Utilisation sans précédent d’une loi de guerre vieille de 227 ans en temps de paix (l’Alien Enemies Act de 1798)
Rhétorique et symbolique fasciste
- Partage sur Truth Social d’une image montrant un triangle rose inversé barré (symbole utilisé par les nazis pour identifier les homosexuels dans les camps de concentration)
- Référence à Joseph Goebbels par le représentant républicain Keith Self lors d’une réunion officielle
- Utilisation du terme « vermines » pour qualifier ses opposants politiques, rhétorique similaire à celle d’Hitler et Mussolini
- Retweet d’une citation attribuée à Mussolini : « Mieux vaut vivre comme un lion que cent ans comme un mouton«
- Gestes interprétés comme des saluts nazis par Elon Musk lors du défilé inaugural et par Steve Bannon lors de la convention conservatrice
Persécution des minorités et opposants
- Plans pour expulser les militaires transgenres de l’armée américaine
- Expulsion de tout étranger ou militant contre son idéologie
- Arrestation de la juge Hannah Dugan dans le Wisconsin
- Attaques et menaces contre des juges, journalistes avocats, universités, et revues scientifiques
- Signature d’ordres exécutifs stipulant que le gouvernement américain ne reconnaît que deux sexes
- Arrestation de manifestants et d’étudiants pro-palestiniens comme Mahmoud Khalil de l’université Columbia
- Arrestation de Rumeysa Ozturk, doctorante turque, pour avoir co-signé un article critique
- Emails du Département d’État demandant à des étudiants internationaux de s’auto-expulser en raison de leur activisme
- Chantage aux cartes vertes, conditionnant la résidence permanente au soutien du régime
- 32 809 arrestations au cours des 50 premiers jours de l’administration Trump
Contrôle de l’information et réécriture de l’histoire
- Suspension des comptes critiques du régime turc sur X par Elon Musk
- Purges des livres antiprogressistes et conservation d’ouvrages suprématistes
- Suppression des références à l’histoire d’Ira Hayes, Marine amérindien, sur les sites du Département de la Défense
- Retrait des documents sur la Shoah par le Pentagone
- Retrait sélectif des sites Web et données du gouvernement, permettant au président de « déclarer sa propre version de l’histoire » selon le New York Times
- Suppression de la lutte contre la désinformation russe
Culte de la personnalité et népotisme
- Création d’une « Gold Card » à l’effigie de Trump permettant d’obtenir un visa permanent contre 5 millions de dollars
- Grâce accordée à 1 500 criminels qui ont soutenu Trump
- Intervention présidentielle pour défendre Elon Musk face au boycott de Tesla, qualifiant ce boycott d' »illégal »
- Purge d’officiers de police et militaires apolitiques
Politique étrangère expansionniste et autoritaire
- Ambitions territoriales concernant plusieurs pays dont le Groenland, comparées par certains historiens au concept d’espace vital nazi (Lebensraum)
- Soutien au plan de transfert de la population de Gaza vers d’autres pays (Égypte, Jordanie), qualifié de « révolutionnaire et créatif » par Netanyahu
- Sanctions américaines contre la Cour pénale internationale suite au mandat d’arrêt contre Netanyahu
- Traitement du président ukrainien Zelensky comme un « dictateur sans élection »
Évaluations d’experts et d’anciens collaborateurs
- Staffan Lindberg, directeur du projet V-Dem : « Si ça continue comme ça, les États-Unis ne seront plus classés comme une démocratie » et « la démocratie [là-bas] ne durera pas six mois de plus »
- Michael Miller, professeur à l’Université George Washington, qualifie déjà les États-Unis d’ « autocratie électorale »
- John Kelly, ancien chef de cabinet de Trump, affirme que Trump correspond à la définition du fascisme
- Mark Milley, ancien chef d’État-major, a décrit Trump comme fasciste
- 13 autres anciens membres de l’administration Trump ont validé les déclarations de Kelly
- L’historien Timothy Snyder : « Trump a toujours été une présence, non une absence : la présence du fascisme«
Parallèles historiques identifiés par des experts
- L’assaut du Capitole comparé au coup d’État raté d’Hitler de 1923
- Similitudes avec la marche sur Rome de 1922 ou les émeutes françaises d’extrême droite de 1934
- L’historienne Ruth Ben-Ghiat voit des parallèles entre l’Agenda 47/Projet 2025 et le Tribunal spécial pour la sécurité de l’État fasciste italien
- Les experts Federico Finchelstein, Olivier Mannoni et Robert Paxton qui rejetaient auparavant la qualification de fasciste pour Trump ont changé d’avis après l’assaut du Capitole
Il est important de noter que certains historiens du fascisme comme Richard Evans et Roger Griffin rejettent la qualification de fasciste pour Trump, montrant qu’il existe un débat académique sur cette question.
Dans cette ère dite de « post-vérité », Trump et ses acolytes ont jeté aux orties toute prétention à la crédibilité ou à la rigueur factuelle. Cette désinvolture cynique leur facilite grandement la tâche. Leur stratégie ? Un déluge quotidien de nouvelles mesures qui, par son rythme effréné, paralyse toute réaction organisée de l’opposition.
Le cas des U.S.A illustre comment une démocratie établie de longue date peut rapidement glisser vers l’autoritarisme sous l’effet d’actions présidentielles qui contournent les garde-fous institutionnels.
Après cette longue aparté Étatsunienne, revenons en France où heureusement le rythme est moins vertigineux et où l’on aurait presque l’impression d’être chanceux en comparaison. Seulement ce qui arrive outre-Atlantique, pourrait également nous arriver et peut-être dès 2027.
Classements et statut démocratique
Le rapport V-Dem 2025 contient quelques informations concernant la France, mais elle n’y fait pas l’objet d’une analyse approfondie:
- La France est classée en 2024 comme « démocratie libérale dégradée » (LD-), soit la catégorie la plus basse des démocraties libérales (Tableau 1, p. 14)
- La polarisation a atteint des niveaux toxiques en France (p. 38 et Tableau 2, p. 39)
- Démocratie libérale considérée comme stable entre 2023 et 2024 (Tableau 10, p. 42)
- La France est présentée comme une démocratie libérale entre 1974 et 2024 (Tableau A1, p. 52)
- La France se positionne au 13ème rang dans l’indice de démocratie libérale (LDI) avec un score de 0,80 et un écart-type de 0,049 (Tableau A2, p. 62)
- Indice de démocratie électorale (EDI): 10ème rang avec un score de 0,87 et un écart-type de 0,045
- Indice de composante libérale (LCI): 16ème rang avec un score de 0,93 et un écart-type de 0,028
- Indice de composante égalitaire (ECI): 33ème rang avec un score de 0,82 et un écart-type de 0,064
- Indice de composante participative (PCI): 29ème rang avec un score de 0,64 et un écart-type de 0,035
- Indice de composante délibérative (DCI): 9ème rang avec un score de 0,94 et un écart-type de 0,051
L’écart-type (« SD+/-« ) représente le niveau d’incertitude associé à chaque mesure des scores démocratiques des pays, permettant d’indiquer la marge de confiance statistique dans l’évaluation.

Il existe également l’indice de démocratie publié par l’Economist Intelligence Unit (EIU), qui offre une évaluation annuelle de l’état de la démocratie dans 167 pays et territoires à travers le monde
Méthodologie de classification
L’EIU évalue chaque pays sur une échelle de 0 à 10, en se basant sur cinq catégories d’analyse. Ces évaluations permettent de classer les pays dans quatre types de régimes distincts.
Catégories d’évaluation
- Processus électoral et pluralisme : Mesure la liberté et l’équité des élections, ainsi que le pluralisme politique
- Fonctionnement du gouvernement : Évalue l’efficacité gouvernementale, la transparence et la responsabilité des dirigeants
- Participation politique : Analyse l’engagement citoyen dans la vie politique
- Culture politique : Examine les attitudes des citoyens envers la démocratie
- Libertés civiles : Mesure le respect des droits fondamentaux et des libertés individuelles
Types de régimes politiques
Démocraties complètes (Full democracies) : Score entre 8,00 et 10,00
- 25 pays (15,0% des pays étudiés, 6,6% de la population mondiale)
- Caractérisées par le respect total des libertés civiles et politiques, une culture démocratique développée, un gouvernement fonctionnel et des médias indépendants
Démocraties imparfaites (Flawed democracies) : Score entre 6,00 et 7,99
- 46 pays (27,5% des pays étudiés, 38,4% de la population mondiale)
- Élections libres et respect des libertés fondamentales, mais présentant des faiblesses significatives dans d’autres aspects de la démocratie
Régimes hybrides (Hybrid regimes) : Score entre 4,00 et 5,99
- 36 pays (21,6% des pays étudiés, 15,7% de la population mondiale)
- Irrégularités électorales substantielles, pressions gouvernementales sur l’opposition, corruption répandue et faible état de droit
Régimes autoritaires (Authoritarian regimes) : Score inférieur à 4,00
- 60 pays (35,9% des pays étudiés, 39,2% de la population mondiale)
- Pluralisme politique absent ou très limité, violations des libertés civiles et répression de la dissidence
La répartition régionale montre une forte concentration des démocraties complètes en Europe occidentale (15 pays), tandis que les régimes autoritaires prédominent au Moyen-Orient et en Afrique du Nord (17 sur 20 pays de la région).
Ce système de classification permet d’observer les tendances démocratiques mondiales, avec un recul global de la démocratie depuis 2006, le score moyen mondial ayant diminué de 5,52 à 5,17 en 2024.
A savoir que cette étude présente des limites, des biais et manquements (comme toutes les études): la subjectivité des indicateurs, l’absence de pondérations explicites, l’occidentalocentrisme, les inégalités socio-économiques, la non prise en compte des mouvements sociaux comme les Gilets Jaunes ou activismes numériques.
Synthèse sur la situation de la France en 2024 Selon l’Economist Intelligence Unit (EIU)

Classement démocratique :
- La France est classée comme « démocratie imparfaite » (26ᵉ mondiale) avec un score de 7,99/10.
- Elle frôle le statut de « démocratie complète » (seuil à 8,00), mais recule à cause d’une instabilité politique accrue.
Points forts :
- Processus électoral : Score élevé (9,58/10) grâce à des élections libres et pluralistes.
- Libertés civiles : Respectées (8,24/10).
Facteurs de déclassement :
- Dissolution de l’Assemblée nationale par Emmanuel Macron, entraînant des élections législatives sans majorité claire. Score moyen (7,50/10) en raison d’une impasse politique après les législatives de 2024 et des difficultés à former un gouvernement stable.
- Culture politique : Faible (6,88/10), avec une défiance envers les partis traditionnels et montée de l’abstention.
- Détérioration significative de la confiance dans le gouvernement
- Impopularité croissante du président Emmanuel Macron
- Progression électorale du Rassemblement National de Marine Le Pen
Tendance historique : La France a déjà été classée comme « démocratie imparfaite » plusieurs fois par le passé (2010-2013, 2015-2018 et 2020-2021).
Démocratie Française sous Macron : Entre Indices Statistiques et Réalités Sociopolitiques
Les données de l’indice de démocratie de The Economist montrent des variations dans le score français depuis 2010. Il est donc redescendu à 7.99 en 2024.

Cette tendance semble contredire les observations empiriques d’une répression accrue et d’un recul des libertés publiques. Pour comprendre ce paradoxe, il faut analyser les critères de l’indice et les réalités politiques sous-jacentes.
L’indice se base sur cinq piliers :
- Processus électoral (intégrité des élections)
- Fonctionnement gouvernemental (efficacité institutionnelle)
- Participation politique
- Culture politique démocratique
- Libertés civiles
La stabilité française s’explique principalement par les critères 1 et 2, malgré une dégradation marquée des libertés civiles (point 5).
Biais de l’étude
- Participation électorale : La hausse de l’abstention (34% en 2022 vs 28% en 2017) n’est pas directement intégrée dans l’indice.
- Stabilité institutionnelle : Le fonctionnement de l’État (critère 2) reste élevé (score de 8.2/10 en 2024), masquant les dérives autoritaires.
- Répression : L’indice sous-estime la répression ciblant des groupes spécifiques (manifestants, minorités) au profit d’une évaluation globale des libertés.
Les lacunes de la démocratie sous Emmanuel Macron (2017-2025)
Catégorie | Mesure Clé | Impact Démocratique | Sources |
---|---|---|---|
Libertés civiles | Loi anticasseurs (2019) et arrestations abusives | Restrictions du droit de manifester | 1️⃣2️⃣3️⃣ |
Justice sociale | Ordonnances travail (2017) | Affaiblissement des syndicats | 1️⃣2️⃣3️⃣4️⃣ |
État de droit | Utilisation de l’article 49.3 (28 fois) | Contournement du débat parlementaire | 1️⃣2️⃣ |
Sécurité | Loi sécurité globale (2021) | Surveillance massive et recours à la force | 1️⃣2️⃣3️⃣4️⃣5️⃣6️⃣7️⃣8️⃣9️⃣🔟 |
Responsabilité ministérielle | Refus des démissions malgré les mises en cause | Affaiblissement de l’exemplarité publique | 1️⃣2️⃣3️⃣4️⃣5️⃣6️⃣ |
Processus démocratique | Nomination de ministres contestés | Déconnexion avec les attentes citoyennes | 1️⃣2️⃣3️⃣4️⃣ |
1. Répression des Manifestations
Dès le début de son premier mandat, Emmanuel Macron a montré son soutien aux forces de l’ordre plus qu’il ne l’a fait pour toute autre fonction ou profession. Et pour cause, il savait qu’il aurait besoin de ces dernières pour dissuader toutes les contestations à venir induites par ses réformes. Est apparue évidente aux yeux de tous, lors des premières manifestations qui n’ont pas tardé, une forme de violence des forces de l’ordre jamais connue jusqu’alors, dont une utilisation importante « d’armes non létales » type LBD qui ont provoqué de graves blessures et dont l’utilisation laissait souvent songeur. Ce ne sont pas les seules méthodes qui ont été utilisées pour calmer toute rébellion:
- Loi « anticasseurs » (2019) : qui est critiquée pour des abus tels que l’interdiction disproportionnée de se dissimuler le visage, les arrestations préventives basées sur des motifs vagues, et la criminalisation de rassemblements pacifiques, ce qui enfreint le droit international selon Amnesty International.
- Utilisation massive de la garde à vue : 11 203 interpellations lors du mouvement des Gilets jaunes (2018-2019), dont plus de la moitié sans poursuites, révélant un usage arbitraire.
2. Violences policières, blessés parmi les manifestants et décès lors d’interventions policières
Il est difficile d’obtenir des données fiables dans ce domaine. Comme cela est précisé sur l’article Wikipedia dédié au sujet: « Pendant longtemps, il n’existe pas en France de statistiques ou de données générales officielles concernant les violences policières, contrairement aux violences contre les forces de l’ordre, qui sont elles recensées« .
Il existe des collectifs comme « desarmons.net » qui documentent le sujet. Leur travail, bien qu’intéressant et important, présente plusieurs biais dans leur méthodologie pour comptabiliser les décès liés aux interventions policières qui peuvent affecter la fiabilité des chiffres avancés:
Nature et positionnement de « Désarmons-les »
Désarmons-les est un collectif militant créé en 2012 qui se donne pour objectif explicite de documenter les violences policières, mais aussi plus largement de contester l’institution policière elle-même. Le site se positionne clairement dans une perspective abolitionniste vis-à-vis de la police, comme l’indique leur texte d’intention : « Nous pensons que l’institution policière est contestable par nature. Elle est le bras armé de l’État, elle incarne la violence d’État. En cela, elle doit être contestée ».
Ce positionnement idéologique très marqué constitue un premier élément à prendre en compte dans l’évaluation de la fiabilité de leurs données.
Méthodologie de collecte des données
La méthodologie employée par Désarmons-les pour comptabiliser les décès liés aux interventions policières présente plusieurs caractéristiques qui peuvent affecter la fiabilité des chiffres avancés :
- Source des données : Le collectif indique s’appuyer sur des « articles de presse » pour recenser les cas de décès lors d’interventions policières. Cette méthode présente plusieurs limites :
- Dépendance à la couverture médiatique, qui peut varier selon les périodes
- Absence de vérification systématique par des sources judiciaires officielles
- Risque d’inclure des cas dont la responsabilité policière n’est pas établie judiciairement
- Définition large des « crimes policiers » : Le collectif inclut dans son décompte différents types de décès survenus lors d’interventions policières, sans nécessairement distinguer :
- Les homicides directs (tirs d’armes à feu)
- Les décès accidentels lors de poursuites
- Les morts survenues en garde à vue ou en détention
- Les cas où la responsabilité policière a été établie ou non par la justice
Biais potentiels dans l’évaluation historique
La comparaison historique présentée par Désarmons-les (entre les présidences Sarkozy, Hollande et Macron) comporte plusieurs biais potentiels :
1. Biais de couverture médiatique
La médiatisation des violences policières a considérablement évolué ces dernières années, notamment avec :
- L’émergence des réseaux sociaux permettant de documenter plus facilement les interventions policières
- Une sensibilité accrue de l’opinion publique à ces questions depuis le mouvement des Gilets jaunes
- La multiplication des médias indépendants couvrant spécifiquement ces sujets
Un cas de décès lors d’une intervention policière en 2005 avait potentiellement moins de chances d’être médiatisé qu’un cas similaire en 2025, ce qui peut créer une impression artificielle d’augmentation.
2. Biais de définition et de catégorisation
La définition de ce qui constitue un « crime policier » a pu évoluer dans le temps, tant dans la perception publique que dans la méthodologie même du collectif. Par exemple, l’inclusion systématique des accidents lors de poursuites dans la catégorie des « crimes policiers » est discutable d’un point de vue juridique.
3. Absence de contextualisation
Les chiffres sont présentés sans contextualisation par rapport à :
- L’évolution des doctrines d’intervention policière
- Les changements législatifs (comme la loi de 2017 sur la sécurité publique mentionnée dans l’article)
- L’évolution du nombre total d’interventions policières
4. Biais de confirmation
Le positionnement idéologique du collectif peut conduire à un biais de confirmation, où les données sont sélectionnées et interprétées de manière à confirmer la thèse d’une augmentation des violences policières sous certains gouvernements.
Comparaison avec d’autres sources
Pour évaluer pleinement la fiabilité de ces chiffres, il serait nécessaire de les comparer avec d’autres sources, notamment :
- Les données officielles de l’IGPN (Inspection Générale de la Police Nationale)
- Les rapports d’organisations internationales comme Amnesty International
- Les travaux académiques sur le sujet
- Les statistiques judiciaires sur les condamnations de policiers
D’autres organes de presse comme « StreetPress » , « Basta! » , « Violencespolicieres.fr » ou encore « Acat France » répertorient les violences policières avec beaucoup de sérieux mais sont également soumis à certains des mêmes biais évoqués dans le cas de « Désarmons-les ».
Avant de regarder les chiffres, il est bon de rappeler que de nombreuses victimes de violences policières en France hésitent à porter plainte, estimant que l’Inspection Générale de la Police Nationale (IGPN), composée majoritairement de policiers, manque de neutralité et favorise un traitement interne des affaires plutôt qu’une sanction judiciaire effective. À l’international, plusieurs pays, comme le Royaume-Uni ou le Danemark, ont mis en place des organismes indépendants, dirigés par des juristes ou des représentants de la société civile, garantissant une impartialité accrue dans le contrôle des forces de l’ordre.
L’ACAT précisait dans son rapport que « les enquêtes administratives et judiciaires, réalisées la plupart du temps par des policiers et des gendarmes, peinent à être impartiales » .
Depuis le 28 février 2025, le procureur de Créteil, Stéphane Hardouin, est à la tête de l’IGPN. Il est le deuxième magistrat à occuper ces fonctions traditionnellement réservées à un fonctionnaire de police depuis 2022 dans l’idée justement d’avoir à la tête de « la Police des Polices » une personnalité indépendante.
2.1. Décès lors d’Interventions Policières
Il est certes possible de consulter les chiffres des rapports de l’Inspection Générale de la Police Nationale (IGPN) dont une synthèse est fournie sur Wikipedia mais il n’est pas possible d’en tirer grand chose sur de possibles dérives car d’une part comme précisé sur Wikipedia « Ce recensement ne doit toutefois pas être strictement considéré comme un recensement des bavures, il prend par exemple en compte les décès de Chérif Chekatt auteur d’un attentat à Strasbourg ou encore celui de Mickaël Harpon, auteur d’un attentat à la préfecture de police de Paris. Il inclut également les suicides provoqués par l’intervention des forces de l’ordre, ainsi, comme l’indique le rapport de l’IGPN de 2018, ce recensement : « n’a donc pas vocation à spéculer sur la légitimité des actions ayant pu conduire à ces blessures ou à ces décès » .
D’autre part, les comparaisons historiques ne peuvent être que partielles, car l’IGPN ne publiait pas de séries complètes avant 2017.
Mais ce pose tout de même le problème des dérives de la légitime défense
La loi du 28 février 2017 relative à la sécurité publique a considérablement modifié le cadre juridique de l’usage des armes par les forces de l’ordre en France. Cette législation permet aux policiers et gendarmes de faire usage de leurs armes « en cas d’absolue nécessité et de manière strictement proportionnée » dans cinq cas précis, dont les refus d’obtempérer. Avant 2017, les policiers devaient démontrer qu’ils agissaient en légitime défense, mais cette loi a introduit une notion de « défense anticipée » et donc un flou dans son interprétation.
L’ambiguïté de cette loi réside dans sa formulation imprécise, notamment concernant les situations où les forces de l’ordre peuvent tirer sur un véhicule « dont les occupants sont susceptibles de perpétrer, dans leur fuite, des atteintes à leur vie ou à leur intégrité physique ou à celles d’autrui ». Une instruction interne de la police nationale (dite « instruction Falcone« ) a amplifié cette ambiguïté en insistant sur « l’assouplissement » opéré par le texte législatif.
D’après l’article de « lesaf.org » (Syndicat des avocat-es de France), les chercheurs Sébastian Roché, Paul le Derff et Simon Varaine ont montré que les tirs policiers mortels ont été multipliés par cinq après la réforme et tout aussi intéressant qu’ « aucun décès n’est intervenu pendant près d’une année après la mort de Nahel, et l’émoi national qui en a découlé. En 2023, le nombre de tirs effectués par des policiers avec leur arme individuelle de service connaît une baisse historique. Tout semble donc indiquer que la pratique policière est loin de n’obéir qu’à la pure nécessité, mais qu’elle est aussi très sensible aux contextes juridique, politique et social. » Grâce à leur méthodologie, ils ont pu invalider l’argument invoqué par les policiers selon lequel cette augmentation des tirs mortels était due uniquement à une augmentation des refus d’obtempérer et à leur dangerosité.
Des cas comme celui de Nahel à Nanterre illustrent tragiquement les dérives possibles de cette législation, où la légitime défense est invoquée dans des situations où la dangerosité de la personne décédée apparaît équivoque. Des experts, comme le commissaire divisionnaire honoraire Julien Sapori, estiment que ce texte ambigu devrait être abrogé.
2.2. Blessures lors des Manifestations
- 92,9 % des blessures des Gilets jaunes liées à l’action policière (entre fin 2018 et début 2020) d’après l’Observatoire des street-medics
- 28 000 blessés recensés les street-medics (Biais : Données auto-déclarées par des collectifs militants, non vérifiées par des institutions indépendantes)
- 2 495 blessés officiels d’après le ministère de l’Intérieur (Biais: Ne comptabilise que les personnes prises en charge par les secours officiels, hors la plupart des personnes blessées en manifestation ne sont pas prises en charge par les secours officiels et sont soignées par les street-medics)
- 30 éborgnements et 5 mains arrachées (Biais : Chiffres basés sur des cas médiatisés – absence de recensement systématique)
- 1 décès
- Le ministre de l’intérieur de l’époque, Christophe Castaner, sous-estimait ces chiffres
2.3. Violences Policières
Il est évident qu’il est impossible d’avoir des chiffres précis sur les violences policières, puisque la majorité du temps, c’est la parole de la victime contre celle d’un représentant des forces de l’ordre, mais il existe des cas médiatisés où des preuves matérielles ont pu être apportées comme dans ce cas survenu le soir du 21 mars 2023, et dont les trois policiers de la BRAV-M étaient jugés, le 7 avril 2025, pour avoir roulé sur la jambe puis frappé un manifestant lors des manifestations contre la réforme des retraites.
La scène avait été filmée ⬇️
Vous pourrez retrouver d’autres exemples via de les collectifs précités.
L’ACAT rappelle, à propos de l’utilisation de la violence, que « deux conditions impératives président à sa mise en œuvre : nécessité et proportionnalité. Tout usage de la force qui ne serait pas nécessaire ou se révélerait disproportionné constituerait une violence policière illégale » .
2.4. Usage des Armes de Maintien de l’Ordre
En plus des LBD, en 2025, la France reste le seul pays européen à utiliser des grenades explosives (notamment la grenade GM2L) pour le contrôle des manifestations, qui est considérée comme un matériel de guerre:
- Les grenades offensives OF-F1 ont été interdites en 2014 suite à la mort de Rémi Fraisse à Sivens, avant la présidence de Macron
- Les grenades lacrymogènes instantanées GLI-F4, contenant une charge explosive de TNT, n’ont pas été formellement interdites mais, selon le ministère de l’Intérieur, il a été décidé en 2018 de « ne plus fabriquer » ces grenades tout en continuant à les utiliser « jusqu’à épuisement des stocks«
- Les grenades de désencerclement, qui projettent des projectiles en caoutchouc semi-rigide, font également l’objet de critiques pour leur dangerosité
- Nouvelles grenades : Le 31 mars 2025, le gouvernement français a lancé un appel d’offres pour des grenades de maintien de l’ordre, incluant des grenades sonores et lacrymogènes avec une portée de 100 à 400 mètres, soit deux fois plus loin qu’aujourd’hui, ce qui pose la question de l’utilité d’envoyer des grenades si loin dans un cortège de manifestants.
- Grenade GM2L : D’après le site « maintiendelordre.fr » La grenade GM2L, produite par Alsetex, est une grenade lacrymogène instantanée qui a remplacé la GLI-F4 interdite en 2014. Elle est classée comme arme de catégorie A2, donc comme « matériel de guerre » .
Les gaz lacrymogènes dont les effets néfastes ont été démontrés par le travail d’Alexander Samuel et l’Association Toxicologie-Chimie de Paris, sont également utilisés de manière systématique et disproportionnée même en présence d’enfants comme à Lyon ou à Toulouse.
Ce rapport scientifique démontre que l’ortho-Chlorobenzylidènemalonitrile (gaz CS), principal composant des gaz lacrymogènes utilisés en France, provoque non seulement des effets irritants immédiats sur les yeux, la peau et les voies respiratoires, mais se métabolise également dans l’organisme en libérant jusqu’à deux molécules de cyanure par molécule de CS, entraînant potentiellement des effets toxiques à court et long terme documentés par plusieurs études, malgré son utilisation courante pour le maintien de l’ordre alors même qu’il est interdit en temps de guerre par la Convention de Genève.
2.5. Sanctions Disciplinaires
Sébastian Roché, directeur de recherches au CNRS et spécialiste de la police, note « la concomitance entre l’élection de Macron et la baisse du nombre de vraies sanctions » . Il n’y a quasiment plus que des « rappels à la loi » . « La justice est désormais la seule à prononcer des exclusions » .
Il attribue cette tendance à une modification des standards de gestion des violences policières par le ministère de l’Intérieur. Il suggère que la crise des Gilets jaunes a pu influencer la hiérarchie policière à considérer les comportements violents comme moins fautifs, ce qui expliquerait la baisse des sanctions.
3. Restrictions Juridiques & Régressions Sociales
- Ordonnances travail (2017)
Réforme du code du travail permettant aux accords d’entreprise de primer sur le droit national (les accords de branche), affaiblissant les syndicats. Les ordonnances travail ont réduit le rôle des instances représentatives du personnel, limité les indemnités prud’homales pour licenciement abusif (barème Macron), et facilité les ruptures conventionnelles collectives, affaiblissant la protection des salariés. - Gouvernement par ordonnances et contournement du Parlement
Dès 2017, le recours massif aux ordonnances pour réformer le Code du travail a limité le débat parlementaire et la concertation sociale, réduisant la place des représentants élus et des syndicats dans la prise de décision. - La loi « Sécurité globale » de 2021 ⬇️
Aspect | Description |
---|---|
Objectif de la loi « Sécurité globale » de 2021 | Renforcer les moyens des forces de l’ordre et moderniser la sécurité publique, notamment via l’élargissement des pouvoirs de la police municipale, le développement de la sécurité privée et l’utilisation accrue des technologies de surveillance comme les drones et caméras-piétons. |
Création d’un nouveau délit censuré | Volonté de création d’un nouveau délit visant la diffusion malveillante d’images de policiers, censuré par le Conseil constitutionnel pour atteinte à la liberté d’informer |
Risques pour la vie privée | La Quadrature du Net dénonce les risques de surveillance de masse liés à l’intensification de la vidéosurveillance fixe et mouvante, ainsi que l’usage disproportionné de drones et caméras-piétons. |
Craintes pour les journalistes | Craintes d’entrave au travail des journalistes et à la documentation des violences policières pour amnesty.org, le Syndicat National des Journalistes (SNJ), la Ligue des droits de l’Homme (LDH) et ACRIMED |
Dispositions discriminatoires envers les étrangers | L’article 23 impose aux ressortissants étrangers non européens de détenir un titre de séjour depuis au moins 5 ans pour accéder à des emplois dans la sécurité privée, ce qui est dénoncé comme discriminatoire par la Défenseure des droits. |
- Réforme des retraites (2023)
Malgré des mois de mobilisation massive contre la réforme des retraites, avec plus d’un million de manifestants dans toute la France dès le 19 janvier 2023 et des grèves soutenues par une majorité de la population, le gouvernement d’Emmanuel Macron a maintenu sa position et fait adopter la loi en recourant à l’article 49.3 de la Constitution, sans vote à l’Assemblée nationale. La promulgation de la réforme le 15 avril 2023, malgré l’opposition persistante des syndicats et de la société civile, a illustré le refus du gouvernement d’écouter la contestation populaire, ce qui a été largement critiqué comme un déni démocratique. - Consultations citoyennes sans effet réel
Les dispositifs de démocratie participative, inspirés des propositions des partis de Gauche (Grand débat national, conventions citoyennes) se révèleront être un simulacre de consultation participative, l’exécutif ignorant ou marginalisant souvent les propositions issues de ces consultations. Ces derniers n’auront quasiment aucun impact sur les décisions finales. - Inscription de l’état d’urgence dans le droit commun
La loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme (2017) a intégré dans le droit commun des mesures d’exception initialement prévues pour l’état d’urgence, élargissant les pouvoirs de l’exécutif au détriment des libertés publiques (assignations à résidence, perquisitions administratives, restrictions de rassemblement). - Réforme de l’assurance chômage
Les réformes successives ont entraîné une baisse de 25 % de la durée d’indemnisation et une réduction du montant des allocations, constituant une régression sociale majeure depuis la création du système en 1958, sans réelle négociation sociale. - Durcissement du droit des étrangers
La loi du 10 septembre 2018 a complexifié les procédures d’éloignement, restreint l’accès au séjour et au marché du travail pour certains demandeurs d’asile, et renforcé les contrôles aux frontières, suscitant de nombreuses critiques d’associations et d’institutions. Mais la politique migratoire de la France sous Emmanuel Macron a continué à se durcir, culminant avec la loi du 26 janvier 2024 qui impose des conditions linguistiques strictes (niveau A2 à B2) pour l’obtention et le renouvellement des titres de séjour, risquant de placer des dizaines de milliers d’étrangers en situation irrégulière. Cette réforme s’ajoute à la circulaire Darmanin de février 2023, qui a restreint les possibilités de régularisation et facilité l’expulsion des personnes déboutées, tout en réintroduisant la « double peine » pour certains étrangers. Ces mesures, critiquées par de nombreuses associations et la Défenseure des droits, témoignent d’une précarisation accrue et d’un contrôle renforcé de la population étrangère en France.
4. Utilisation massive de l’article 49.3: un « déni de démocratie »
Si mes comptes sont bons, au 18 Avril 2025, l’article 49.3 a été utilisé à 28 reprises depuis le premier mandat d’Emmanuel Macron depuis 2017, et son deuxième mandat n’est pas fini !
Premier Ministre | Nombre d’utilisations du 49.3 |
---|---|
Édouard Philippe | 1 |
Élisabeth Borne | 23 |
Michel Barnier | 1 |
François Bayrou | 3 |
Total | 28 |
Sous le règne d’Emmanuel Macron, l’article 49.3 est devenu l’équivalent politique de la carte « Joker » : la Première ministre Élisabeth Borne l’a actionné à elle seule 23 fois entre mai 2022 et janvier 2024, soit une moyenne d’un recours par mois, pulvérisant la trêve de trois décennies sans usage aussi intensif sur les textes budgétaires. Conçu à l’origine comme un instrument d’exception pour surmonter les blocages parlementaires, le 49.3 s’est transformé en routine administrative, permettant au gouvernement de faire adopter des lois majeures sans vote, au prix d’un débat parlementaire sacrifié et d’une légitimité démocratique sérieusement écornée. Les oppositions, pas vraiment ravies de voir le Parlement réduit à une chambre d’enregistrement, dénoncent à chaque activation un « déni de démocratie » — et il faut reconnaître qu’imposer des réformes aussi contestées que celle des retraites sans vote, c’est offrir à la démocratie représentative un joli bras d’honneur. Certes, la Constitution prévoit que l’opposition peut riposter par une motion de censure, mais dans les faits, le 49.3 est devenu le symbole d’un pouvoir exécutif qui gouverne sans majorité claire, ni mandat populaire solide, et qui préfère la force à la persuasion.
5. « L’exemplarité » macronienne promie…
Dans son discours du 4 octobre 2023 à l’occasion du 65e anniversaire de la Constitution de la Ve République, Emmanuel Macron a évoqué « la morale publique, le sens des responsabilités, l’exemplarité des élites, comme le sens du devoir de chaque citoyen » comme des « fondements qui ne dépendent pas d’un texte » mais d’un « sursaut » collectif.
… Et en chiffres
L’exemplarité tant vantée par Emmanuel Macron se traduit, après huit années de présidence, par un palmarès judiciaire digne d’une série politique ! Pas moins de 24 membres de ses gouvernements ont été mis en cause dans diverses affaires judiciaires. Le bilan ? 21 condamnations dont 5 ministres, 10 mises en examen, 9 démissions forcées pour causes judiciaires, et encore 13 enquêtes en cours.
Quand le président évoque « l’exemplarité des élites », on a du mal à y croire lorsqu’une telle part du casting gouvernemental s’est retrouvé dans le viseur de la justice.
Les refus de démission
Plusieurs membres d’un des gouvernements Macron ont refusé de démissionner malgré les accusations qui étaient portées sur eux dont Gérald Darmanin, Éric Dupond-Moretti, Olivier Dussopt ou encore Bruno Le Maire. La jurisprudence sous Macron a souvent été de maintenir les ministres tant que la justice ne les avait pas condamnés, invoquant la présomption d’innocence.
Les jugements tardifs de Cour de justice de la République (CJR) servent à légitimer a posteriori des choix controversés
On pourrait considérer que la justice a donné raison à l’exécutif de jouer sur la présomption d’innocence puisqu’aucun de ces derniers n’avait été condamné lorsqu’ils étaient encore en poste mais par la suite, Olivier Dussopt a été reconnu coupable en 2024 de « favoritisme » et dans le cas d’Éric Dupond-Moretti, deux magistrats ont finalement été récemment indemnisés après que l’ex-ministre de la justice ait ouvert des enquêtes administratives (alors qu’il avait eu des différends avec eux), ce qui leur a porté préjudice.
Cependant il existe un cas bien plus problématique (à mes yeux), celui du Premier Ministre actuel, François Bayrou dont les preuves de ses mensonges dans l’affaire Bétharram ne manquent pas lorsqu’il prétend n’être intervenu de quelque manière que ce soit, ni même avoir été mis au courant des dérives qui ont eu lieu dans cet établissement.
Des plaintes pour « entrave à la justice » et « recel de crime » sont en cours d’examen à Pau. Une commission d’enquête parlementaire a été ouverte, et François Bayrou doit être entendu sous serment le 14 mai 2025.
Parmi les derniers éléments en date, un gendarme en charge de l’enquête confirme sous serment que François Bayrou serait intervenu dans la procédure judiciaire visant le père Carricart, accusé de viols sur un ancien élève.
En attendant que justice se fasse, malgré sa mise en cause pour son rôle présumé de non-dénonciation et d’entrave à la justice et malgré plusieurs témoignages accablants, il refuse de démissionner et continue d’avoir le soutien du président de la République, ce qui est aussi un déni de démocratie.
A noter que la Cour de justice de la République (CJR), compétente pour juger les membres du gouvernement en France pour les crimes ou délits commis dans l’exercice de leurs fonctions, est souvent critiquée pour son manque de célérité et sa complaisance supposée envers les anciens ministres. Elles est restée en place malgré les critiques et les propositions de réforme visant à la remplacer par une juridiction de droit commun.
6. Nomination de ministres contestés
L’article 8 de la Constitution de la Cinquième République française stipule que :
« Le Président de la République nomme le Premier ministre. Il met fin à ses fonctions sur la présentation par celui-ci de la démission du Gouvernement. Sur la proposition du Premier ministre, il nomme les autres membres du Gouvernement et met fin à leurs fonctions. »
Après la dissolution de l’Assemblée nationale par Emmanuel Macron en 2024, les résultats des élections législatives anticipées de 2024 montrent que le Nouveau Front populaire (NFP), formé notamment par La France insoumise, le Parti socialiste, Les Écologistes et le Parti communiste français, a devancé les autres forces politiques, ce qui lui donne une majorité relative de sièges à l’Assemblée nationale.
On aurait pu s’attendre donc à ce que le président de la République nomme un représentant du Nouveau Front Populaire mais il nommera à la place Michel Barnier puis François Bayrou. Deux personnalités qui non seulement ne faisaient pas partie des groupes majoritaires mais qui surtout sont proches idéologiquement de lui.
Une fois de plus Emmanuel Macron a fait semblant d’écouter les français pour finalement ne choisir que des Premiers ministres qui lui mangeraient dans la main… On pourrait donc dire que c’est comme s’il choisissait lui-même tous les ministres. Et de fait, il n’y a qu’à voir les ministres choisis pour s’en convaincre. Encore un simulacre de démocratie !
7. Attaques contre la presse
- Classement RSF :
- La France est passée de la 45e place en 2016 à la 24e place en 2023 dans le classement mondial de la liberté de la presse de RSF. Cette progression s’explique en partie par une méthodologie révisée et la dégradation de la situation dans d’autres pays, mais les critiques sur les violences policières et la concentration des médias persistent.
- Journalistes blessés :
- Lors des six premiers mois du mouvement des Gilets jaunes (fin 2018 – début 2019), 54 journalistes ont été blessés par les forces de l’ordre selon RSF.
- Entre 2019 et 2020, environ 200 journalistes ont été empêchés de travailler lors de la couverture des Gilets jaunes et autres mouvements sociaux (source FIJ).
- Violences et entraves :
- De nombreux cas de violences physiques, confiscations de matériel, procédures judiciaires (procédures-bâillons), perquisitions, gardes à vue, harcèlement en ligne, et menaces contre les journalistes ont été documentés tout au long des deux mandats Macron.
- Perquisitions médiatiques :
- En février 2019, une tentative de perquisition des locaux de Mediapart, dans le cadre de l’affaire Benalla, a été jugée illégale par le tribunal de Nanterre, qui a condamné l’État pour atteinte à la liberté d’expression et au secret des sources.
- En septembre 2023, la journaliste Ariane Lavrilleux a été perquisitionnée et placée en garde à vue pour avoir révélé des informations confidentielles sur des opérations françaises en Égypte, suscitant de vives réactions dans la profession.
- Législation et climat :
- Plusieurs lois (secret des affaires, « fake news », article 24 de la loi « sécurité globale ») ont été critiquées pour leur potentiel à restreindre le travail des journalistes.
- Les syndicats et ONG dénoncent une hausse des entraves à la liberté de la presse, malgré l’amélioration du classement RSF.
Virage à l’extrême droite toute !
Bien que la tendance droitière soit palpable depuis de nombreuses années, elle semble s’accélérer grandement ces derniers mois. Dans le but de faire le buzz, des politiques de droite font tellement dans la surenchère que les partis d’extrême droite comme le RN et Reconquête finissent par paraître modérés, aidant Marine Le Pen dans son entreprise de dédiabolisation qu’elle a entamée il y a une dizaine d’années et qui semble malheureusement réussie.
Macron et ses propos ambiguës
Emmanuel Macron et ses proches, à travers la loi immigration, multiplient les références à des concepts issus de l’extrême droite, comme le « réarmement démographique » ou « pour que la France reste la France », et adoptent des mesures initialement promues par le RN
Gérald Darmanin, le double visage
Gérald Darmanin, qui a prétendu à plusieurs reprises combattre l’extrême droite et ses idées, les reprend pourtant parfois à son compte.
Déjà en En 2020, il évoque « l’ensauvagement d’une partie de la société », un terme historiquement utilisé par l’extrême droite pour désigner la criminalité supposée liée à l’immigration. Cette expression a été largement critiquée pour sa proximité idéologique avec le RN et la droite radicale.
En 2021, le même Gérald Darmanin avait aidé le RN à paraître plus présidentiable en répondant à Marine Le Pen : « Madame Le Pen, dans sa stratégie de dédiabolisation, en vient quasiment à être dans la mollesse je trouve… Il vous faut prendre des vitamines, je ne vous trouve pas assez dure là » sur les questions ayant trait à l’islam radical, ce qui d’après des proches de cette dernière avait fait leurs affaires. ⬇️
« Au final, ça nous rend service. Ca crédibilise notre stratégie de présidentialisation », se réjouit un membre de l’entourage de Marine Le Pen. « Ceux qui pensent vraiment que Marine Le Pen est molle sur l’islamisme… face à Macron, ils nous choisiront toujours. »
« Comment voulez-vous qu’ils expliquent que le fascisme et la dictature arrivent, alors qu’on est mou? », appuie un membre du premier cercle lepéniste. « À trop vouloir jongler, dribbler en débat, Darmanin a marché sur le ballon. »
En 2023, Il propose la dissolution de trois groupes d’extrême droite tout en multipliant les déclarations martiales sur l’immigration et la sécurité, et en reprenant à son compte des thèmes et des mots de l’extrême droite dans la défense de son projet de loi immigration.
Toujours dans le cadre du projet de loi immigration, Darmanin soutient des mesures inspirées de la « préférence nationale » (accès restreint aux prestations sociales pour les étrangers, limitation du droit du sol à Mayotte), des propositions historiquement portées par le RN.
Récemment, lors de la condamnation de Marine Le Pen et des assistants parlementaires européens, Darmanin est accusé de multiplier les politesses envers le RN. Il a insisté sur le respect du droit au recours et à un jugement rapide (avant la présidentielle de 2027), ce qui a été interprété par certains commentateurs comme une forme de politesse ou de neutralité bienveillante envers la cheffe du RN dans ce contexte judiciaire.
Une confiscation qui confine à l’absurde
La dernière trouvaille de notre ministre de la Justice pour terrasser le fléau de la drogue : saisir les smartphones des consommateurs comme on confisquerait un jouet à un enfant turbulent. Quelle brillante idée que de priver des citoyens de leur principal outil de communication, de travail et de vie sociale pour avoir consommé une substance illicite ! Pendant qu’on y est, pourquoi ne pas aussi confisquer les chaussures des fraudeurs du métro ? Cette mesure, aussi disproportionnée qu’inefficace, illustre parfaitement cette politique du chiffre et du spectacle qui préfère s’attaquer aux symptômes plutôt qu’aux causes.
Imaginez un instant l’absurdité bureaucratique : des commissariats transformés en entrepôts de smartphones, des policiers devenus gardiens d’iPhone, pendant que les véritables réseaux de trafic s’adaptent en quelques heures. Cette atteinte flagrante aux libertés individuelles, déguisée en fermeté républicaine, nous rappelle que dans la France de 2025, la tentation autoritaire se cache parfois derrière les mesures les plus ridicules.
François Bayrou de plus en plus loin du centre
En 2025, le Premier ministre, François Bayrou, reprend à son compte l’expression de « submersion migratoire », traditionnellement utilisée par l’extrême droite, pour décrire la situation à Mayotte et dans d’autres départements français. Il assume publiquement ce choix de vocabulaire, malgré les critiques sur la reprise d’un discours d’extrême droite.
Vous trouverez plus d’informations sur ses déclarations dans mon article.
Bruno Retailleau, l’odeur permanente de l’extrême droite
En juillet 2023, Retailleau déclare sur France Info, à propos des jeunes issus de l’immigration dans les quartiers populaires : « il y a une sorte de régression vers les origines ethniques », une formulation dénoncée comme raciste et très proche du discours identitaire d’extrême droite.
Lors d’une conférence sur la sécurité, Retailleau félicite publiquement Alice Cordier, cheffe de file du collectif identitaire Némésis, pour son « combat », affichant ainsi une proximité idéologique avec des groupes ouvertement racistes et islamophobes. Il déclare: « Bravo pour votre combat, vous savez que j’en suis très proche » .
En 2024, Retailleau remet en cause le caractère intangible de l’État de droit concernant l’immigration, une position soutenue par la quasi-totalité des parlementaires LR, et qui s’aligne sur les revendications du RN et illustrant la fusion idéologique croissante entre la droite traditionnelle et l’extrême droite.
C’est à se demander quel est le nombre de membres des LR à avoir fait semblant d’être choqué lorsque Éric Ciotti, alors président de LR, justifie en 2024 une alliance avec le RN en déclarant : « nous disons la même chose ».
Lors d’une interview sur CNEWS le 15 avril 2025, il a même ajouté : «Je pense que le Rassemblement national est très à gauche… sur les sujets économiques», «on a développé l’assistanat». Il veut fusionner toutes les aides en une et la plafonner à 70% du SMIC. Ce mec est tellement extrême qu’il essaie de faire passer le RN pour du socialisme.

Quant à savoir ce qu’il reste de l’exemplarité, comme parfois un exemple vaut mieux que milles mots, je vous laisse juger ⬇️
Éric Ciotti : « Grand remplacement », « priorité nationale »… et pas une once de gêne
S’il y en a bien un qui ne se cache pas depuis longtemps de lécher les bottes de l’extrême droite c’est bien Éric Ciotti.
Dans des propos rapportés par RTL, lors du débat du congrès LR en novembre 2021, Éric Ciotti prononce des propos en lien avec la théorie du « grand remplacement » :
- « Éric Ciotti affirme que le « remplacement » n’est plus un tabou en France. »
- « Il affirme qu’il est inutile de nier la réalité, que la France est en train de changer. »
- « Il faut que cela s’arrête. Je souhaite que la France reste la France, nous sommes les héritiers d’une civilisation judéo-chrétienne et que mes enfants vivent dans un pays fidèle à son histoire. »
Il prône également la « priorité nationale » dans sa campagne à l’investiture LR.
Éric Ciotti a déclaré lors des présidentielles de 2022 qu’il pourrait voter pour Reconquête (le parti d’Éric Zemmour) en cas de duel avec Emmanuel Macron.
Sur BFMTV, à la mi-octobre 2021, Éric Ciotti a affirmé :
« Entre Éric Zemmour et Emmanuel Macron, je voterai Éric Zemmour. »
Il a confirmé par la suite sur le plateau de BFM Politique, en janvier 2022, qu’il ne reniait pas ses propos : « Je ne renie en rien aucun de mes propos » et a maintenu qu’il voterait pour Valérie Pécresse au premier tour, mais que, dans un second tour opposant Zemmour à Macron, il choisirait Zemmour qui défend la théorie du « grand remplacement ».
Lors de la campagne présidentielle de 2022, il détourne un rapport de France Stratégie pour justifier la théorie du « grand remplacement » :
Pour ceux qui ne savent pas de quoi il s’agit ou qui pensent que le « grand remplacement » existe, je vous recommande de lire mon article sur le sujet ⬇️
Finalement en 2024, Éric Ciotti, alors président de LR, justifie une alliance avec le RN en déclarant : « nous disons la même chose ».
Laurent Wauquiez, jaloux du buzz des autres, s’y met aussi
Interrogé sur l’existence d’un phénomène de “grand remplacement” dans l’Hexagone sur CNews, le mardi 8 avril, Laurent Wauquiez déclare :
Il estime que :
« C’est une réalité démographique quand vous avez 7 % d’étrangers »
… Considérant qu’il y a :
« une démographie française qui s’effondre et une démographie des familles étrangères qui explose »
Il a appelé à :
« une bien plus forte et ferme régulation de l’immigration »
Le Championnat de France de dingueries politiques
En cette année 2025, la France semble emportée dans un tourbillon de droitisation accélérée qui ferait presque passer les années précédentes pour une paisible promenade en centre-ville. Entre condamnations retentissantes, soutiens internationaux embarrassants et déclarations surréalistes, le paysage politique français offre un spectacle qui oscillerait entre tragédie et vaudeville si les enjeux n’étaient pas si cruciaux.
Élisabeth Borne et l’orientation professionnelle dès la maternelle
Dans le palmarès des déclarations surréalistes, Élisabeth Borne s’est taillé une place de choix en suggérant qu’il fallait « se préparer très jeune, dès le départ, presque depuis la maternelle, à réfléchir à la façon dont on se projette dans une formation et dans un métier demain ».
À 3 ans, âge où l’on hésite encore « entre sucer son pouce ou la pâte à modeler« , voilà que le gouvernement voudrait déjà nous faire réfléchir à notre avenir professionnel.
Face au tollé provoqué par ses propos, la ministre a tenté de se rattraper sur Twitter : « Non on ne va pas orienter les élèves de la maternelle ». Un démenti qui n’efface pas la philosophie sous-jacente : « mettre les enfants des classes populaires au travail dès le plus jeune âge, sans pouvoir faire d’études ».
Un peu de Rab de Laurent Wauquiez ?
Laurent Wauquiez, encore lui, a dû considérer que récupérer la théorie du “grand remplacement” ne suffisait pas pour se démarquer, il a donc proposé :
« Il fait 5 degrés de moyenne pendant l’année, cent quarante-six jours de pluie et de neige. Je pense qu’assez rapidement ça va amener tout le monde à réfléchir »
Saint-Pierre-et-Miquelon répond avec humour à la proposition de Laurent Wauquiez ⬇️
La condamnation de Marine Le Pen : quand la justice frappe et l’internationale réactionnaire s’agite
Le 31 mars 2025, le tribunal correctionnel de Paris a condamné Marine Le Pen à cinq ans d’inéligibilité avec exécution immédiate pour détournement de plusieurs millions d’euros de fonds publics européens. Cette décision judiciaire, basée sur des faits amplement caractérisés, a immédiatement déclenché une vague de soutiens internationaux aussi prévisible que révélatrice.
Le Kremlin, par la voix de son porte-parole Dmitri Peskov, a déploré une « violation des normes démocratiques » . On appréciera l’ironie venant d’un régime qui a fait de l’emprisonnement et de l’assassinat d’opposants une spécialité nationale. Viktor Orbán, Premier ministre hongrois et champion autoproclamé de l’illibéralisme, n’a pas tardé à poster un vibrant « Je suis Marine! » sur X. Jair Bolsonaro, lui-même condamné à une peine d’inéligibilité au Brésil, parle de « persécution » et affirme être à ses cotés. Un soutien que d’aucuns qualifieraient de baiser de la mort pour celle qui s’évertue depuis des années à dédiaboliser son parti.
D’autres figures d’extrême droite ont joint le chœur des indignés : Matteo Salvini évoquant une « déclaration de guerre de Bruxelles », Geert Wilders se disant « choqué » par ce jugement « extrêmement sévère », ou encore Tom Van Grieken dénonçant « une attaque contre la démocratie ». Même Donald Trump, expert en contestation des décisions de justice, s’est fendu d’un commentaire faisant une comparaison avec ses affaires judiciaires.
Face à ce concert de soutiens embarrassants, on pourrait se demander si Marine Le Pen ne préférerait pas un peu moins d’amis et un peu plus de discrétion sur sa condamnation.
Comme précisé par Libération :
« Comme le veut la jurisprudence du Conseil constitutionnel, Marine Le Pen conserve son mandat national, de députée du Pas-de-Calais – bien qu’elle ne puisse pas se représenter si des législatives anticipées sont convoquées après une nouvelle dissolution. Elle doit en revanche perdre immédiatement son mandat local, de conseillère départementale du Pas-de-Calais. »
Marine Le Pen a beau se poser en victime d’un soi-disant « procès politique », la meilleure manière de ne pas être condamnée, elle et de nombreux membres de son parti, était tout simplement de ne pas détourner d’argent…
Entre déclarations ambiguës et masquent qui tombent
Difficile de ne pas remarquer l’étrange ballet de contorsions oratoires auquel se sont livrés certains responsables politiques et éditorialistes après la condamnation de Marine Le Pen. Entre François Bayrou, soudain « troublé » par la sévérité du jugement, et Laurent Wauquiez, qui s’inquiète qu’« il n’est pas sain que, dans une démocratie, une élue soit interdite de se présenter à une élection », on peine à discerner où finit la défense de l’État de droit et où commence la complaisance envers une fraude pourtant solidement établie. Ces ambiguïtés, reprises en chœur par plusieurs éditorialistes, laissent planer le doute sur la capacité de certains à accepter que la justice s’applique aussi aux puissants. Le Conseil supérieur de la magistrature, dans un communiqué rare, a dû rappeler son « inquiétude » face à ces réactions « de nature à remettre en cause gravement l’indépendance de l’autorité judiciaire ». Ambiance : la juge Bénédicte de Perthuis et ses collègues ont même dû être placés sous protection policière après une vague de menaces, preuve que les attaques contre l’institution judiciaire ne restent hélas pas que verbales lorsque le fascisme pointe le bout de son nez.
Quand Marine Le Pen se rêve en Martin Luther King
Dans le clan, de plus en plus fourni, des personnes nées avant la honte, Marine Le Pen a réussi l’exploit de s’approprier l’héritage de Martin Luther King. Lors d’un rassemblement place Vauban à Paris le 6 avril, elle a déclaré que sa « ligne de conduite serait celle, pacifique, du pasteur Martin Luther King pour les droits civiques des citoyens américains, à l’époque, opprimés et privés de droits » .
Cette comparaison entre une femme politique condamnée pour détournement de fonds publics et une icône de la lutte pour les droits civiques assassinée par un ségrégationniste blanc en 1968 n’a pas manqué de faire réagir la famille du pasteur. Martin Luther King III (le fils de Martin Luther King) et son épouse Arndrea Waters King, ont dénoncé une « distorsion inappropriée de l’histoire » qui « porte atteinte aux sacrifices consentis par ceux qui se sont opposés à la haine et se sont battus pour la justice » .
Une façon polie de dire « merci de ne pas utiliser notre nom pour votre opération de victimisation » .
Selon Pieyre-Alexandre Anglade (EPR), Marine Le Pen se compare même à Alexei Navalny
Dans une vidéo diffusée sur BFM TV, le député Pieyre-Alexandre Anglade déclare : « La violence des propos de Marine Le Pen devrait être dénoncée, la manière indigne qu’elle a eu de se comparer à Alexei Navalny, combattant infatigable de la liberté » .
Le RN contre le climat : quand on préfère casser le thermomètre
Comme si les scandales judiciaires ne suffisaient pas, le Rassemblement National et leurs alliés de l’UDR ont trouvé une nouvelle cible : le Haut Conseil pour le Climat. Des députés d’extrême droite ont déposé un amendement visant purement et simplement à supprimer cette institution indépendante chargée d’évaluer l’action publique en matière de climat59.
Leur argument ? Le coût, bien sûr ! Selon eux, le HCC représenterait « un coût non négligeable pour le contribuable » avec « 801k€ en 2022, pour 10 réunions, soit 80,1k€ par réunion ». Une arithmétique impressionnante si elle n’était pas totalement débile. L’amendement a été rejeté à l’Assemblée nationale.
Cette stratégie n’est pas sans rappeler ce qui s’est passé aux États-Unis : « retirer les mentions du changement climatique des rapports officiels et des sites internet du gouvernement, couper les budgets des agences environnementales » . Quand on ne peut pas nier le réchauffement climatique, autant faire taire ceux qui en parlent !
Un virage droitier qui ne dit pas son nom
Quand les responsables politiques de tous bords commencent à reprendre sans sourciller les éléments de langage jadis réservés à l’extrême droite, quand les condamnations judiciaires sont présentées comme des persécutions politiques, et quand on envisage sérieusement de faire réfléchir des enfants de 3 ans à leur « projet professionnel », on peut légitimement s’interroger sur la direction que prend le débat public.
Entre une extrême droite condamnée par la justice mais soutenue par ses pairs internationaux, et un gouvernement qui semble glisser progressivement vers des positions et un vocabulaire jadis considérés comme inacceptables, les lignes se brouillent dangereusement. Ce qui était impensable hier devient acceptable aujourd’hui et pourrait bien être la norme demain.
À ce rythme, on se demande quelle sera la prochaine étape de cette course effrénée vers la droitisation. L’avenir nous le dira, et il risque malheureusement d’arriver plus vite qu’on ne le pense.
Le RN au pouvoir en 2027 ?
Bien que tout ce qui précédait ne fût pas reluisant, le plus grand risque pour la démocratie vient selon moi du Rassemblement National qui, grâce au travail de dédiabolisation de Marine Le Pen, ayant appris des erreurs de son père, et aidé par la montée des idées d’extrême droite partout dans le monde, a de bonnes chances de se retrouver au pouvoir en 2027, même s’il ne sera probablement pas représenté par Marine Le Pen après sa condamnation à 4 ans d’emprisonnement, dont 2 ferme aménagés sous bracelet électronique, et à une amende de 100 000 euros pour «détournement de fonds publics et de complicité de détournement de fonds publics» ainsi qu’à une inéligibilité immédiate de cinq ans.